Province Législature Session Type de discours Date du discours Locuteur Fonction du locuteur Parti politique Québec 30e 2e Discours du budget 28 mars 1974 M. Raymond Garneau Ministre des Finances PLQ M. Garneau : M. le Président, je viens de déposer, il y a quelques instants, les crédits budgétaires de l'exercice 1974/75 qui donnent la ventilation par programme des sommes que le gouvernement du Québec entend dépenser au cours de l'année financière qui débutera dans quelques jours. Il importe maintenant d'expliquer à cette Assemblée la façon dont le gouvernement entend financer ce programme de dépenses, de même que les mesures additionnelles concernant la fiscalité. Après avoir fait un bref retour sur l'exercice qui se termine, j'exposerai notre programme budgétaire pour l'année 1974/75, en terminant par une revue des relations économiques et fiscales du Québec avec le gouvernement fédéral. Comme par les années passées, je dépose un certain nombre d'annexes qui sont incluses dans le texte du discours du budget. L'annexe I fournit une description de la situation économique à l'aide de tableaux et graphiques; l'annexe II représente les résultats de l'exercice 1973/74 et, enfin, l'annexe III comprend également des tableaux et des graphiques relativement à l'exercice 1974/75. Comme on l'a souligné à diverses reprises depuis quelques mois, l'année 1973 fut une année exceptionnelle. Les données les plus récentes montrent que les principaux indicateurs de l'activité économique au Québec ont évolué de la façon suivante: 1) hausse du produit national brut québécois de 13.7 % et d'environ 7 % en termes réels; 2) augmentation également prononcée, 13 %, du revenu personnel des Québécois; 3) création de 128,000 nouveaux emplois, principalement concentrés dans le secteur manufacturier; 4) baisse du taux de chômage moyen, qui est passé de 8.3 % en 1972 à 7.4 % en 1973; 5) hausse de 14.8 % des immobilisations privées et publiques; 6) augmentation de 28.3 % des immobilisations du secteur manufacturier. Qu'il me soit permis de signaler que le taux d'accroissement des investissements, en particulier dans le secteur manufacturier, a été, au Québec, supérieur à celui de l'ensemble du Canada, et cela pour la deuxième année consécutive. Ainsi, la part du Québec dans l'ensemble des immobilisations manufacturières est passée de 18.2 % en 1971 à 23.9 % en 1973. Ces résultats indiquent bien que les politiques économiques que le gouvernement Bourassa a mises de l'avant au cours des dernières années ont porté les fruits attendus. Cette croissance économique s'est évidemment fait sentir au niveau des recettes gouvernementales. Une analyse rapide des revenus du gouvernement du Québec pour l'exercice 1973/74 montre un accroissement marqué de 32 % au chapitre de l'impôt sur le revenu des sociétés, qui atteindra $305 millions. D'autre part, l'impôt sur le revenu des particuliers fournira au trésor public la somme de $1,663 millions, soit une augmentation de 21.4 % par rapport à l'année précédente. L'ensemble des impôts sur le revenu et sur les biens a connu une augmentation de 22 %, augmentation légèrement inférieure à ce qui s'est passé l'an dernier. Du côté des ventes au détail, celles-ci ont continué de progresser, ce qui s'est traduit par une augmentation de 12.4 % des taxes à la consommation; cet accroissement, comme pour ce qui est de l'impôt sur le revenu et sur les biens, a été légèrement inférieur au taux de croissance connu en 1972/73. Le rendement de la taxe sur les carburants a toutefois été plus élevé que par les années passées, même si les taux ($0.19 le gallon pour l'essence et $0.25 le gallon pour l'huile à chauffage) n'ont pas été augmentés depuis 1968. Cette augmentation est due aux mesures de contrôle que le ministère du Revenu a mises en application au cours du dernier exercice, à la suite de l'adoption, par cette Assemblée, de la Loi de la taxe sur les carburants, qui est entrée en vigueur le 1er juillet 1973. L'huile à chauffage doit maintenant être colorée, mesure qui empêche certains contribuables peu scrupuleux de frauder le fisc en utilisant l'huile à chauffage non imposable comme carburant pour les moteurs diesel. Dans l'ensemble, l'impôt sur le revenu et sur les biens et les taxes à la consommation ont augmenté à des taux légèrement inférieurs à ceux de 1972/73, ce qui me porte à croire que ceux qui disent que le gouvernement du Québec se finance à même l'inflation sont dans l'erreur. Parmi les autres sources de revenus, le Québec a bénéficié d'une augmentation de 21 % au titre des paiements fédéraux inconditionnels. Cette hausse est attribuable principalement à l'élargissement, à compter du 1er avril 1973, de la formule de péréquation pour y inclure les revenus de l'impôt foncier scolaire. On se souviendra qu'au cours des conférences des ministres des Finances de 1971 et 1972, le Québec avait particulièrement insisté sur cette amélioration du régime de péréquation. Au total, l'ensemble des revenus du gouvernement du Québec atteindront vraisemblablement $5,038 millions pour l'exercice qui se terminera dans quelques jours. Du côté des dépenses, l'inflation a provoqué une augmentation du coût de plusieurs programmes gouvernementaux. C'est ainsi que nous avons dû débourser plus de $40 millions pour l'ajustement au coût de la vie des salaires et traitements des employés des secteurs public et parapublic. L'inflation a également gonflé le coût de construction et d'entretien des routes et des édifices publics. De plus, nous avons dû faire face aux dépenses découlant du nouveau programme d'allocations familiales et au remboursement des dépenses prévues par la loi électorale. Au total, les dépenses nettes du gouvernement, incluant les immobilisations, atteindront quelque $5,296 millions. Puisque les revenus s'élèveront à $5,038 millions, le déficit des opérations budgétaires sera donc de $258 millions, soit $20 millions de moins que ce que j'avais prévu lors de mon Discours sur le budget du 29 mars 1973. Comme les dépenses d'immobilisations s'élèveront à $458 millions, nous aurons donc financé près de la moitié de ces immobilisations à même nos revenus courants. Malgré cette baisse de $20 millions de notre déficit probable, nos besoins financiers ont cependant dépassé nos prévisions en raison d'une augmentation importante au chapitre des placements à long terme, prêts et avances. En effet, nous avons consacré à ce titre $141 millions alors que j'en avais prévu $89 millions dans mon discours du 29 mars dernier. Cette hausse est imputable principalement à des investissements découlant de législations récentes comme celles qui ont entraîné l'acquisition d'actions ordinaires de la Société générale de financement et de la Société d'exploration forestière, deux lois qui ont été adoptées suite au budget de l'an dernier. Une autre loi prévoyait des avances à la Société de développement immobilier du Québec. Enfin, les prêts et avances à certains autres organismes ont été plus élevés que prévus. C'est donc dire que les besoins de fonds nouveaux se sont élevés à $399 millions pour les opérations budgétaires et extrabudgétaires. Par ailleurs, au cours du dernier exercice, nous avons affecté $276 millions aux remboursements d'emprunts et aux contributions à divers fonds d'amortissement. Ainsi que je l'ai expliqué l'année dernière, les nouveaux emprunts qui ont servi à ces fins ne constituent pas un accroissement de la dette publique. Ce montant de $276 millions est toutefois supérieur à ce que nous avions prévu. Nous avons dû faire face, en particulier, à des demandes plus fortes de remboursement d'obligations d'épargne, étant donné que leurs détenteurs pouvaient obtenir un meilleur rendement de titres concurrents. Cette situation s'est toutefois corrigée depuis que nous avons ajusté à la hausse les taux d'intérêt de ces obligations d'épargne. Finalement, l'Hydro-Québec, pour sa part, a emprunté $465 millions au cours de l'exercice 1973, soit $35 millions de moins que le programme d'emprunt qui avait été annoncé dans le discours sur le budget de 1973. M. le Président, j'aimerais maintenant aborder le programme budgétaire et fiscal du gouvernement pour le prochain exercice, lequel programme est axé sur trois objectifs principaux: 1) d'abord assurer la poursuite de l'expansion en vue de favoriser la création d'emplois en privilégiant de nouveaux investissements dans les secteurs clés de l'économie; 2) accroître le programme d'aide municipale amorcé depuis quelques années; 3) soutenir le pouvoir d'achat des contribuables à revenu modeste par les allégements fiscaux appropriés. Les facteurs prédominants de l'évolution de l'économie en 1974 seront, sans contredit, la crise du pétrole qui a éclaté en fin d'année dernière et qui a marqué cette évolution de l'économie et également par l'inflation. Contrairement à la majorité des pays industriels, le Canada exporte à peu près l'équivalent de ce qu'il importe en pétrole. En termes de balance de paiements et de croissance économique, il sera, en dernière analyse, moins affecté. Ce qu'il importe de reconnaître, toutefois, c'est que la situation est fort différente suivant les régions du pays où l'on se trouve. C'est ainsi que le Québec et les Maritimes doivent importer à peu près tout leur pétrole. Pour éviter des écarts de prix trop prononcés qui auraient défavorisé les provinces de l'Est, il était indispensable d'adopter un prix uniforme à travers le pays, prix qui demeurerait inférieur au prix international. Fort heureusement, le principe de ce prix fut adopté lors de la Conférence des Premiers ministres en janvier dernier et il a été confirmé, de façon évidente, à celle d'hier. Le nouveau prix canadien de $6.50 le baril permettra à la fois de rétribuer les provinces productrices, d'assurer le développement accéléré de nouvelles ressources pétrolières et à l'ensemble de l'économie d'ajuster sa consommation sans pour autant réduire trop fortement sa demande pour d'autres biens et services. Enfin, en demeurant à un niveau inférieur au prix international, le prix intérieur procurera un avantage à nos entreprises qui pourront ainsi développer de nouveaux marchés extérieurs. Je pense que la conférence d'hier, M. le Président - celle des premiers ministres - est extrêmement importante pour l'avenir du Québec et celui du Canada. J'aimerais aujourd'hui féliciter les premiers ministres de l'ensemble des provinces et, en particulier, le premier ministre du Québec pour sa contribution au développement du fédéralisme canadien, contribution qui, pour les Québécois, se traduit par des centaines de millions de dollars dont ils pourront bénéficier, soit en réduction du prix du pétrole, soit au titre de la péréquation. Le deuxième facteur qui influencera l'économie au cours de l'année qui vient, c'est certainement la question de l'inflation. Bien que le prix intérieur du pétrole puisse aider au maintien d'une conjoncture économique favorable, il n'empêchera pas la poussée générale des prix. La plupart des pays industriels ont connu en 1973 une forte croissance économique, de telle sorte que diverses pénuries se sont manifestées, entraînant à travers le monde des hausses prononcées du prix des principaux produits de base. En raison de leurs nombreux échanges avec l'extérieur, le Canada et le Québec ne peuvent pas se mettre à l'abri, d'une façon complète, de l'inflation mondiale. Toutefois, en ce qui regarde l'inflation, notre performance dans ce domaine se compare avantageusement à celle des autres pays. C'est ainsi que l'indice des prix à la consommation s'est accru, en 1973, en moyenne, au Canada, de 7.6 % - à Montréal et pour le Québec, de 6.7 % - alors qu'il augmentait, que l'inflation frappait de 11 % le Japon et l'Italie, de 9 % le Royaume-Uni, de 8.5 % la Suisse et les Pays-Bas. Aux États-Unis, l'augmentation de l'indice des prix à la consommation a été de 6.2 %. Toutefois, il faut noter que la croissance réelle de l'économie américaine, en 1973, a été inférieure à 6 % alors qu'elle a été supérieure à 7 % au Canada et au Québec. Dans divers milieux, on a suggéré de s'attaquer résolument à cette inflation soit par une politique de restriction de la demande, soit encore par un gel des prix et des revenus. Le gel des prix et des revenus pourrait peut-être réussir à tempérer quelque peu l'inflation, mais de façon temporaire seulement; l'expérience des États-Unis dans ce domaine est très révélatrice. De plus, une telle mesure n'aurait guère d'effet sur les prix des produits importés, produits qui chez nous représentent près du quart de la demande globale. D'un autre côté, les politiques restrictives réduiraient sensiblement la croissance de l'économie et aggraveraient ainsi le chômage. Si les entreprises et les salariés peuvent se prémunir plus ou moins rapidement contre les effets de l'inflation par des ajustements de prix et de salaires, nombreux sont ceux qui ne le peuvent pas parce qu'ils dépendent de revenus fixes. Je considère donc que la meilleure approche à la hausse des prix actuelle consiste à soutenir le revenu de ceux qui en sont le plus affectés. C'est pourquoi nous avons augmenté sensiblement et indexé au coût de la vie les allocations familiales, les prestations d'aide sociale et les diverses rentes que nous versons. J'exposerai plus loin d'autres mesures, fiscales celles-là, destinées à soutenir et même à améliorer le sort des gens à revenu modeste. En dépit de la crise du pétrole et de l'inflation, l'emploi devrait continuer de croître à un rythme convenable en 1974. Je voudrais signaler à ce sujet une situation plutôt paradoxale. Il est en effet surprenant que le taux de chômage reste relativement élevé alors que notre économie fonctionne à un niveau très près de sa capacité et que le nombre de postes vacants, en particulier dans certaines régions et dans certains secteurs de l'activité économique, demeure très élevé. En fait, il semble bien qu'on ne puisse plus interpréter la statistique du chômage de la même façon que nous le faisions il y a quelques années. Plusieurs nouvelles mesures sociales ou transformations de mesures existantes rendent le chômage moins pénible. De nombreuses personnes sont maintenant classées comme chômeurs parce qu'elles préfèrent attendre un peu plus longtemps pour trouver un emploi plus satisfaisant ou encore ne veulent pas se déplacer vers d'autres régions, et non pas parce qu'il leur est impossible de trouver un emploi. D'ailleurs, des études faites pour l'ensemble du Canada et qui se confirment à l'échelle du Québec tendent à renforcer cette hypothèse et à démontrer que le critère numérique de plein emploi ne peut plus être le même qu'au cours des années soixante. En somme, malgré la crise du pétrole et la hausse des prix, on peut s'attendre à ce que 1974 soit une bonne année sur le plan économique. Le budget que je présente aujourd'hui se situe dans cette perspective: Il vise à la fois à assurer la poursuite de l'expansion, à accroire l'aide au secteur municipal et à permettre aux contribuables à revenu modeste de faire face à la hausse du coût de la vie. Comme je le signalais dans mon Discours du budget de l'an dernier, toutes les dépenses du gouvernement, et non seulement celles qui sont classées dans la mission économique, ont un impact sur l'économie. L'on peut donc dire qu'avec son budget brut qui sera cette année de l'ordre de $6.6 milliards, le gouvernement du Québec supporte directement ou indirectement plus de 20 % des emplois au Québec, bien que cette dimension ne soit pas nécessairement reflétée dans les crédits de la mission économique. De façon tangible, notre action économique s'exercera par une augmentation de 16.8 % des investissements publics réalisés, subventionnés ou autorisés par le gouvernement du Québec, portant ces investissements à plus de $2.2 milliards en 1974/75. Les principaux postes qui contribuent à cet accroissement sont les dépenses en capital du gouvernement lui-même, en particulier pour les grands axes routiers comme on le verra plus loin. Il y a également une hausse substantielle du programme d'investissements de l'Hydro-Québec et de la Société d'énergie de la Baie James qui, ensemble, prévoient dépenser $633 millions en 1974 au regard de $551 millions en 1973. Il y a enfin une expansion du programme d'investissements de certaines autres sociétés d'État, expansion que le gouvernement a autorisée en raison de la contribution que ces sociétés fournissent au développement économique du Québec. C'est ainsi que la Société québécoise d'exploration minière (Soquem) poursuivra ses travaux d'exploration et de mise en valeur, suite à notre décision de l'an dernier d'augmenter son capital-actions; c'est également dans cette perspective que se situe la décision du gouvernement d'augmenter le capital-actions de SIDBEC et de SOQUIP. L'un des éléments importants de notre politique économique consiste à accélérer la transformation de la structure industrielle du Québec. Or, il est reconnu que la sidérurgie et ses industries connexes constituent un secteur clé du développement économique. D'ailleurs, depuis quelque temps déjà, l'on décèle une grande rareté des produits de l'acier et, comme conséquence, une forte augmentation de leurs prix. Le gouvernement a donc jugé que pour répondre à la demande croissante au Canada et pour favoriser la restructuration industrielle du Québec, il était opportun de permettre à SIDBEC d'entreprendre un vaste programme d'expansion de l'ordre de $200 millions. Ces travaux qui démarreront incessamment permettront à SIDBEC d'accroître sensiblement sa capacité, de rationaliser davantage son exploitation et de diversifier sa production de façon à améliorer sa rentabilité. De plus, SIDBEC pourra entreprendre, et cela pour la première fois au Québec, la transformation de notre minerai de fer en produits finis. Des négociations se poursuivent actuellement avec d'autres entreprises en vue de l'exploitation d'un gisement de minerai de fer qui donnerait à SIDBEC une garantie d'approvisionnement pour plusieurs années à venir. Pour permettre la réalisation de cette expansion, le gouvernement du Québec prendra une participation additionnelle de $60 millions dans le capital-actions de SIDBEC, lequel sera ainsi porté à $156 millions; un projet de loi sera bientôt présenté à cette fin. De plus, Sidbec obtiendra de l'Office de Planification et de Développement du Québec une subvention de $30 millions, suite à l'entente conclue récemment entre le ministère fédéral de l'Expansion économique régionale et le gouvernement du Québec. Le solde du coût du projet sera financé par les revenus de la Société et par des emprunts. Par ailleurs, dans mon analyse de la situation économique, j'ai signalé les problèmes découlant de la crise énergétique actuelle. La décision du gouvernement de mettre en valeur les ressources hydro-électriques de la baie James 'permettra au Québec non seulement de s'approvisionner en électricité, mais aussi de se prémunir contre une hausse trop rapide des prix, ce qui serait le cas si nous obtenions une bonne partie de notre énergie électrique de centrales thermiques. Mais on doit reconnaître toutefois la dépendance quasi entière du Québec à l'égard des approvisionnements étrangers en produits pétroliers. Cette dépendance ne sera réduite que partiellement par le prolongement de l'oléoduc de Sarnia à Montréal. En effet, même lorsque celui-ci sera terminé, le Québec devra continuer d'importer de l'extérieur du Canada les deux tiers des ressources pétrolières dont il a besoin. Il importe donc de procéder à l'exploration intensive de notre vaste territoire, afin de découvrir le pétrole ou le gaz naturel qu'il est susceptible de renfermer. C'est à cette mission que se consacre depuis quatre ans déjà SOQUIP. Le rythme de financement initial de $1.5 million par année, prévu dans la loi qui a créé SOQUIP, lui a permis d'effectuer les premières étapes de l'exploration de son domaine minier (géologie et géophysique) mais ce financement ne suffit plus maintenant pour lui permettre d'effectuer les forages devenus nécessaires à la suite de ces premiers travaux. Face à la situation énergétique actuelle, le gouvernement a donc décidé de donner à SOQUIP les moyens d'entreprendre cette étape des forages tant sur terre que dans les eaux territoriales. C'est pourquoi son capital-actions sera porté de $15 à $100 millions. Dès l'année 1974/75, la contribution annuelle du gouvernement passera de $1.5 million à $7.5 millions. Et pour les années subséquentes, les versements annuels en capital-actions seront établis en fonction du rythme du programme d'exploration de SOQUIP. Par suite d'heureuses associations avec des entreprises pétrolières, chaque dollar dépensé par SOQUIP a entraîné jusqu'à maintenant des dépenses de $4.65 par des associés. Sur la base de cette expérience, l'on peut donc prévoir que le nouveau capital-actions de $100 millions de SOQUIP entraînera des dépenses totales de plusieurs centaines de millions de dollars dans l'exploration pétrolière au Québec, augmentant d'autant la probabilité de découvertes. Ces investissements nouveaux dans SOQUIP et dans 3IDBEC, l'augmentation du capital social de SOQUEM et de REXFOR l'an dernier et la création de la Société de développement de la baie James montrent bien la volonté du gouvernement Bourassa d'utiliser les instruments de développement que le Québec s'est donnés depuis quelques années. Depuis 1970, le gouvernement du Québec a entrepris des travaux routiers d'envergure qui ont permis non seulement de stimuler la création d'emplois, mais de parachever ou d'améliorer des axes routiers essentiels au développement de l'économie québécoise. C'est dans cet esprit que nous avons utilisé les sommes prêtées par le gouvernement fédéral dans le cadre des programmes spéciaux de création d'emplois. C'est également dans cet esprit que nous avons abordé les nouvelles ententes avec le ministère de l'Expansion économique régional. Deux projets majeurs sont actuellement en voie de négociation avec le gouvernement fédéral. Le premier constitue en quelque sorte le prolongement du projet d'expansion de SIDBEC, puisqu'il vise à assurer de meilleurs axes de communication entre le centre industriel Sorel-Tracy et les zones urbaines de Montréal et du centre du Québec. Dès la signature de l'entente, nous entreprendrons la phase active de ce qu'il est maintenant convenu d'appeler l'autoroute de l'Acier entre Boucherville et Tracy. Le coût global de ce projet est évalué actuellement à $44 millions; en 1974/75, nous prévoyons dépenser quelque $13 millions à la première phase de ce projet qui devrait s'étaler sur trois ans. Le second projet se situe dans le cadre du développement des axes routiers autour de l'aéroport de Mirabel. L'autoroute 13, qui reliera le nouvel aéroport à celui de Dorval, devrait entraîner des dépenses totales de $130 millions échelonnées également sur trois ans et, pour 1974/75, il est prévu de consacrer $50 millions à ce projet. Le ministère des Transports poursuivra également les grands travaux routiers entrepris depuis quelques années dans plusieurs régions du Québec: la transquébécoise; l'intermunicipale à Trois-Rivières; Dufferin-Montmorency à Québec; l'autoroute de la Beauce et l'autoroute 40 entre Trois-Rivières et Québec. Je voudrais également signaler le parachèvement de la route 138 jusqu'à Havre-Saint-Pierre, sur la Basse Côte-Nord. Nul doute que ce prolongement de la route jusqu'à Havre-Saint-Pierre aura un impact important sur l'économie de cette région. Revenant au développement économique du côté du secteur privé, je rappellerai qu'en 1971 l'Assemblée nationale adoptait, pour la période allant du 1er avril jusqu'au 31 mars 1974, la Loi favorisant le développement industriel au moyen d'avantages fiscaux. Cette mesure permet à certaines entreprises de déduire de leurs bénéfices, selon différentes zones, 30 %, 50 % ou même 100 % des sommes investies dans des usines ou de l'équipement destinés à fabriquer des produits de haute technologie, des produits non encore fabriqués au Québec ou des marchandises destinées à l'exportation. Déjà, l'on a accepté des projets totalisant plus de $400 millions, dont $140 millions se qualifiaient pour cet allégement fiscal. L'on peut dire que cette mesure, ajoutée à l'amortissement accéléré et à la suspension de la taxe de vente sur la machinerie industrielle, n'est certainement pas étrangère à la hausse de 54 % observée depuis deux ans dans les immobilisations totales du secteur de la fabrication au Québec. Rappelons que, pendant la même période, ces immobilisations n'augmentaient que de 9 % dans le reste du Canada. Comme les mesures autorisant l'amortissement accéléré et suspendant l'imposition de la taxe de vente sur l'achat de machinerie industrielle prendront fin le 31 mars 1975, je propose donc de prolonger jusqu'à cette date, jusqu'au 31 mars 1975, les dispositions de la Loi favorisant le développement industriel au moyen d'avantages fiscaux. Pendant l'année qui vient, nous procéderons à une réévaluation de ces diverses lois incitatrices en vue, le cas échéant, de les abolir, de les modifier ou de les reconduire. Pour les mêmes raisons, le gouvernement reconduira jusqu'au 31 mars 1975 la disposition qui permet aux entreprises d'amortir sur deux ans leurs investissements en machinerie destinée à lutter contre la pollution de l'air et de l'eau. Ce règlement, venu à échéance le 31 décembre dernier, prendra fin en même temps que les autres mesures fiscales favorisant le développement industriel. M. le Président, je voudrais maintenant faire part à cette Assemblée des mesures que nous entendons prendre pour aider davantage le secteur municipal. Depuis quelques années déjà, nous avons augmenté sensiblement nos transferts financiers et fiscaux aux municipalités, et le budget de l'exercice 1974/75 constitue une autre preuve tangible que nous entendons poursuivre cet objectif. C'est ainsi que, suite à notre décision de l'an dernier d'assumer 40 % du déficit d'exploitation des offices municipaux d'habitation à loyers modiques, les dépenses du gouvernement du Québec à ce titre seront doublées pour être portées à $11 millions par année. De plus, l'aide aux équipements d'aqueducs et d'égouts sera accrue de 25 % par rapport à l'an dernier. Signalons également que la redistribution de la taxe de vente vaudra au-delà de $25 millions de plus aux municipalités, portant ainsi le coût total de ce transfert à $235 millions. On voudra bien noter que les crédits déposés indiquent un montant de $225 millions à ce poste. Ce chiffre, établi en décembre dernier, a dû être révisé en fonction de nouvelles prévisions de revenus de la taxe de vente. Conformément aux engagements que nous avions pris, en particulier lors de la conférence provinciale-municipale de 1971, nous avons aboli la contribution municipale aux unités sanitaires. Au cours de l'exercice 1974/75, nous prendrons à notre compte les charges que supportent encore certaines municipalités pour les services de santé. Uniquement pour la ville de Montréal, cela représente tout près de $5,500,000. En plus de ces transferts accrus aux différentes municipalités dont je viens de parler, je voudrais vous faire part maintenant de quelques mesures additionnelles. D'abord, les communautés urbaines. Depuis quelques années, les communautés urbaines de Montréal, de Québec et de l'Outaouais ont été chargées de fonctions locales. C'est ainsi que le transport en commun, l'évaluation foncière, la promotion industrielle entre autres ont été confiés à ces organismes. Le financement de ces communautés devient toutefois de plus en plus lourd pour les municipalités. C'est pourquoi nous avons prévu pour l'exercice 1974/75 des crédits de $28.7 millions pour aider les communautés urbaines à équilibrer leurs budgets, soit plus du double du montant qui était inscrit au budget 1973/74. Une telle augmentation manifeste certes des besoins pressants, mais elle nous invite également à réévaluer le rythme de développement de certains services urbains. Dans mon Discours sur le budget du 29 mars 1973, j'annonçais que le taux normalisé de l'impôt foncier scolaire serait abaissé pour être porté à $1.30 au 1er juillet 1973. À compter du 1er juillet 1974, il sera de nouveau abaissé de $0.05 du $100 d'évaluation pour s'établir à $1.25. Nous remplirons ainsi la promesse que nous avions faite d'abaisser le taux normalisé de l'impôt foncier scolaire de $0.15 du $100 d'évaluation sur une période de trois ans, permettant ainsi d'élargir de plus de $50 millions l'espace fiscal réservé aux municipalités sans alourdir le fardeau des contribuables fonciers. Cet élargissement de l'impôt foncier municipal est rendu possible grâce à une augmentation équivalente des subventions d'équilibre budgétaire que le gouvernement verse aux commissions scolaires. M. le Président, les grandes municipalités, et vous le savez, doivent faire face à des frais de fonctionnement et de rénovation proportionnellement plus élevés que ceux des municipalités de taille plus faible. C'est ce qui ressort d'ailleurs des documents qui ont été présentés à la conférence provinciale-municipale tenue en 1971. En second lieu, le rendement de leur impôt foncier est en quelque sorte limité du fait que l'expansion démographique se produit surtout en banlieue. Enfin, nos grandes municipalités doivent affecter des sommes importantes à la promotion touristique. C'est ainsi, par exemple, que la ville de Québec vient d'inaugurer un Centre des congrès qu'elle a construit à ses propres frais, lequel attirera des milliers de visiteurs dans notre région et contribuera à l'essor de l'industrie touristique chez nous. Compte tenu de ces facteurs, nous avons décidé de procurer à ces grandes municipalités des revenus plus abondants et en relation plus étroite avec la croissance de l'économie. Pour ce faire, le gouvernement innovera en remettant aux municipalités de plus de 150,000 âmes, selon le dernier recensement, 50 % du produit de la taxe sur les repas et l'hôtellerie perçue sur leurs territoires respectifs. Les versements seront effectués aux mêmes dates que la répartition de la taxe de vente. Cette mesure, qui entrera en vigueur le 1er avril, procurera dès 1974/75 des revenus additionnels de l'ordre de $20 millions pour les trois municipalités impliquées, soit Montréal, Laval et Québec. Évidemment, M. le Président, quand nous avons fait cette évaluation de $20 millions, nous nous sommes basés sur l'expérience des années passées. Et si l'on tient compte du développement qui se fait dans la région de Québec, dans la région de Montréal et, également, dans votre ville, M. le Président, je ne serais pas surpris que ce montant de $20 millions soit véritablement un minimum et qu'éventuellement, en 1974/75, il dépassera cet objectif. L'an dernier, nous avons introduit un nouveau programme de subventions aux municipalités. En vertu de ce programme, le gouvernement a versé en 1973/74 des subventions de $4 par tête aux municipalités de 25,000 à 50,000 âmes, de $6 par tête à celles de 50,000 à 100,000 âmes et de $10 par tête à celles de 100,000 âmes et plus. En 1974/75, le niveau de ces subventions sera modifié. Toutes les municipalités ayant une population de 50,000 âmes et plus, selon le recensement de 1971, recevront une subvention per capita de $10. Cela signifie, M. le Président, qu'une ville, par exemple, comme Verdun, qui intéresse certainement notre collègue, verra sa subvention passer de $448,000 à $747,000. Sherbrooke qui a reçu l'an dernier $480,000, en recevra cette année $807,000, et ainsi de suite. En fait, toutes ces municipalités, soit celles de Hull, Lasalle, Longueuil, Montréal-Nord, Sainte-Foy, Saint-Laurent, Saint-Léonard, Sherbrooke, Trois-Rivières et Verdun bénéficieront donc de ces subventions accrues. Quant aux municipalités de 25,000 à 50,000 âmes, elles verront leur subvention portée de $4 à $6. C'est ainsi que des villes comme Anjou, Cap-de-la-Madeleine, Charlesbourg, Chicoutimi, Dollard-des-Ormeaux, Drummondville, Granby, Jonquière, Lachine, Outremont, Pierrefonds, Pointe-aux-Trembles, Pointe-Claire, Rimouski, Saint-Hubert, Saint-Jean, Saint-Jérôme, Shawinigan, et Valleyfield bénéficieront de cette augmentation de subvention per capita. À la suite de ces modifications, le coût de ce programme passe à $27 millions en 1974/75. Toutefois, M. le Président, j'aimerais ajouter immédiatement que les municipalités de 25,000 âmes et moins ne seront pas oubliées. Dans leur cas, il est difficile d'appliquer un système de subventions uniformes en raison de la très grande diversité de leur situation financière. Nombre d'entre elles, par exemple, comme je l'ai déjà signalé, sont à ce point favorisées par le mécanisme de redistribution de la taxe de vente qu'elles peuvent équilibrer leur budget sans recourir ou en recourant très faiblement à l'impôt foncier. Devant cette situation, nous avions introduit l'an dernier un programme spécial de $3 millions prévoyant une assistance financière aux municipalités de cette catégorie qui doivent faire face à des dépenses qui dépassent leurs ressources financières. Pour l'année 1974/75, je propose de porter ce crédit à $7 millions. Toutes ces mesures d'aide aux municipalités amélioreront leur situation financière et introduiront, pour les plus populeuses d'entre elles, une nouvelle source de revenus plus sensible à l'essor économique. En résumé, M. le Président, l'aide financière et fiscale du gouvernement du Québec au secteur municipal, en 1974/7 5, dépassera $570 millions, soit près de $125 millions de plus que l'an dernier ou une augmentation de 28 %. Pour mieux illustrer le vif intérêt que le présent gouvernement porte aux municipalités, qu'il me soit permis de rappeler que l'aide financière et fiscale qui leur était accordée en 1969/70 s'élevait à $190 millions. Cette aide aura donc été triplée en moins de cinq ans. Quand on prend en considération le fait que l'ensemble des dépenses du secteur municipal en 1973 atteignait $1 milliard et que le gouvernement du Québec y contribue pour un montant de l'ordre de $570 millions, c'est dire l'importance des transferts, soit directs soit indirects, du gouvernement du Québec vers le secteur municipal. J'aimerais aborder maintenant les mesures budgétaires et fiscales de soutien du revenu. J'ai mentionné précédemment que l'un des objectifs majeurs de ce budget était non seulement de maintenir, mais également de hausser le pouvoir d'achat des contribuables à revenu modeste par une augmentation importante des sommes consacrées au soutien du revenu et par des allégements fiscaux sélectifs. Je voudrais maintenant rappeler les politiques récemment mises en application et faire part à cette Assemblée de mesures additionnelles que le gouvernement entend prendre. D'abord le programme d'allocations familiales. J'aimerais attirer votre attention et celle des députés de cette Chambre sur le fait que, même si le nouveau programme d'allocations familiales a déjà été annoncé, c'est véritablement en 1974/75 que nous retrouvons sur le plan financier son impact. En fait, le programme d'allocations familiales québécoises en vigueur depuis le 1er janvier 1974 exigera des dépenses additionnelles nettes de $25 millions annuellement. Cette augmentation, jointe à la décision du gouvernement du Québec de ne pas taxer ses propres allocations, ni celles du gouvernement fédéral - $500 millions du fédéral et $100 millions du Québec - augmentera en vérité et en réalité le pouvoir d'achat des familles québécoises de $100 millions par année. J'ai déjà expliqué comment et pourquoi le gouvernement en était venu à cette décision. Lors de la révision globale du programme d'allocations familiales, nous aurions pu, à l'instar des autres provinces, nous contenter de fixer le niveau des allocations familiales à être versées par le gouvernement fédéral. Nous aurions pu alors réintroduire les exemptions pour les enfants de 16 ans et moins et taxer - comme ça va se faire ailleurs dans les autres provinces - les allocations familiales versées par le gouvernement fédéral. Cette solution offrait d'autant plus d'attraits qu'elle aurait rendu la structure fiscale du Québec presque identique à celles du gouvernement fédéral et des autres provinces. Cette uniformisation aurait en outre permis au trésor québécois de financer l'indexation en 1974 et même de procurer au trésor public un gain net de $25 millions. C'est donc dire que le choix que nous avons fait d'augmenter nos allocations familiales et de ne taxer ni ces allocations québécoises, ni celles du gouvernement fédéral coûte plus cher au gouvernement du Québec que n'aurait coûté l'uniformisation de la fiscalité québécoise au même niveau que celles des autres provinces et cela en incluant l'indexation dont on parle et sans tenir compte des mesures que j'annoncerai dans quelques instants. C'est pour cela que nous avons pris cette décision en tant que gouvernement, c'est que le gouvernement actuel voulait montrer l'appui qu'il désire accorder à la famille. Nous avons préféré augmenter davantage le pouvoir d'achat des contribuables mariés ayant des enfants à charge. Pour ce faire, comme je l'ai indiqué, majoré les allocations familiales, qui constituent en quelque sorte des crédits d'impôt remboursables. Et quand on nous parle de crédits d'impôt dans d'autres milieux, on oublie qu'au Québec ces allocations familiales constituent en fait des crédits d'impôt et des crédits d'impôt remboursables. Et nous avons choisi en même temps de ne pas imposer ces allocations québécoises et fédérales versées aux familles québécoises. Cette politique a provoqué une forte augmentation du pouvoir d'achat des familles québécoises. Ces dernières - et je le répète - sont plus avantagées en 1974 par notre régime fiscal et nos allocations familiales qu'elles ne le seraient en appliquant les mesures qui sont en vigueur dans les autres provinces, à l'inclusion de l'indexation. On peut d'ailleurs s'en rendre compte à l'analyse du tableau 6 de l'annexe III, qui est partie intégrante de mon discours. Ceux qui voudront analyser en détail comment on en arrive à cette situation pourront facilement s'en rendre compte. Toujours dans ces mesures que nous avons mises de l'avant pour supporter le pouvoir d'achat et le revenu des contribuables, je dois dire que, depuis quelques années, le gouvernement du Québec indexe au coût de la vie ou verse en paiements forfaitaires à ses employés du secteur public et para public, un montant forfaitaire correspondant à l'augmentation de l'indice des prix à la consommation, suivant une formule qui a été négociée entre le gouvernement et les syndicats. En 1973/74, cette indexation a entraîné des dépenses de plus de $40 millions pour l'ensemble de ces secteurs. Les crédits de l'année 1974, que je viens de déposer et qui sont contenus dans le document qui vous sera remis incessamment, comprennent $135 millions en vue de payer ce montant forfaitaire relatif à l'indexation des traitements des employés du secteur public et parapublic. Cette prévision a toutefois été faite en décembre dernier, c'est-à-dire au moment où nous disposions de données sur les prix à la consommation pour la période se terminant en novembre 1973. Or, les données supplémentaires de trois mois nous contraignent maintenant à prévoir des dépenses à ce titre de l'ordre de $185 millions. Je déposerai donc des crédits supplémentaires de $50 millions à cette fin et le programme de financement que je décrirai plus loin en tiendra nécessairement compte, comme il tiendra compte également des mesures additionnelles d'aide au secteur municipal. Le gouvernement a également décidé d'indexer les transferts de l'État au titre des régimes universels de rentes à celui de l'aide sociale et même à celui des allocations familiales québécoises qui, comme je l'ai indiqué, constituent des crédits d'impôt remboursables. Bref, ces mesures d'indexation s'appliqueront en 1974/75 à une masse de plus de $3.5 milliards, soit à plus de la moitié des dépenses du gouvernement. Le reste du budget de dépenses doit, lui aussi, subir les pressions de l'inflation. En effet, comme tous les contribuables, l'État doit faire face à la hausse des prix qui affecte les travaux de construction de routes et d’immeubles, l'achat ou la location de services, etc. Il est donc facile de se rendre compte que si, d'un côté, les dépenses augmentent de façon plus rapide en raison de l'inflation et que, de l'autre, le rendement des impôts devait être ajusté à la baisse au rythme de l'inflation – ce qui serait le cas si on l'indexait - bien, il manquerait de l'argent quelque part. Le gouvernement n'est pas muni d'une corne d'abondance d'où jaillit comme par enchantement tout ce qu'on exige de lui en termes monétaires. Les fonds que nous déboursons, il faut les trouver dans les goussets des contribuables. Plutôt que de préconiser des baisses générales d'impôt, nous tentons d'agir de façon plus spécifique sur certaines catégories de contribuables qui doivent être aidés soit en raison de la modicité de leur revenu ou à cause de leurs charges familiales. L'un des objectifs majeurs de notre politique consiste justement à mieux répartir ce fardeau fiscal, en permettant notamment à certaines catégories de contribuables moins fortunés, surtout les familles, de maintenir et même d'augmenter leur pouvoir d'achat. C'est dans cet esprit que nous avons modifié notre régime d'allocations familiales et que nous avons fait adopter des réductions sélectives d'impôt au cours des dernières années. C'est le même objectif que nous poursuivons en présentant les mesures que je voudrais maintenant annoncer. D'abord, M. le Président, je dois vous dire que, rétroactivement au 1er janvier 1974, les exonérations d'impôt sur le revenu des particuliers seront portées de $2,500 à $2,600 pour les célibataires et de $5,000 à $5,200 pour les contribuables mariés. En d'autres termes, les célibataires dont le revenu net - je ne parle pas de revenu brut; je parle du revenu net, suivant la définition qu'on retrouve dans le formulaire d'impôt - est moins de $2,600 et les gens mariés gagnant moins de $5,200 ne paieront plus d'impôt au Québec. De plus, à compter également du 1er janvier 1974, nous introduirons des exonérations additionnelles, mais partielles toutefois, pour les contribuables célibataires dont le revenu net se situe entre $2,600 et $2,850 et pour les contribuables mariés dont le revenu net varie entre $5,200 et $5,785. Ces contribuables n'auront pas désormais à payer un impôt qui soit supérieur à 50 % de la différence entre leur revenu net et le niveau des exonérations. Au total, M. le Président, ces dernières mesures que je viens d'annoncer signifient que 150,000 contribuables à revenu modeste bénéficieront - 152,800 pour être plus précis d'une réduction d'impôt de l'ordre de $18 millions, pour une baisse moyenne de $120 par tête; pour un nombre important de contribuables, la baisse d'impôt pourra même atteindre $200. M. le Président, vous savez que selon la législation fiscale actuelle, les premiers $250 de revenu du conjoint ou d'un contribuable n'affectent pas les exemptions personnelles de ce dernier. Ce palier n'a pas été relevé depuis longtemps, alors que la situation financière de beaucoup de ces conjoints qui, généralement restent au foyer, a été modifiée. Plusieurs s'adonnent à la garde d'enfants, d'autres acceptent des emplois temporaires et d'autres, enfin, touchent de modestes revenus de placements. C'est pourquoi à compter du 1er janvier 1974, ce palier de $250 sera doublé pour être porté à $500 sans affecter l'exemption de contribuable marié. M. le Président, nous avons également décidé d'augmenter, à compter du 1er janvier 1974, de $650 à $1,000 les exemptions permissibles pour les personnes âgées, les gens qui sont confinés à leur lit, les aveugles et les infirmes. Cela signifie, M. le Président, qu'en plus de l'exemption dont ils bénéficient, comme contribuables célibataires ou mariés, les personnes âgées, les infirmes et les aveugles pourront bénéficier, à compter du 1er janvier, d'une exemption additionnelle qui sera portée à $1,000. En plus des réductions d'impôt que je viens d'annoncer, mon collègue, le ministre du Revenu, présentera certains autres amendements à nos lois fiscales. Je voudrais parler maintenant de l'impôt successoral. Au cours des dernières années, nous avons procédé à des réductions importantes de l'impôt successoral en raison surtout de l'imposition des gains de capital au décès du contribuable. C'est ainsi que le 1er janvier 1973, en plus de relever les exonérations de base à $150,000 pour les successions en ligne directe et à $10,000 pour les autres, nous avons aboli, le 1er janvier 1973, la majoration de 25 % qui avait été décrétée en 1972 pour percevoir nous-mêmes la part de 25 % de l'impôt successoral qui était alors perçue pour notre compte par le gouvernement fédéral. Le gouvernement fédéral s'étant retiré complètement de ce champ fiscal à l'avantage des provinces, nous avions apporté cette modification. En outre, depuis le 1er janvier 1974, nous avons appliqué une baisse additionnelle de 20 % à toutes les catégories d'héritiers. Maintenant, à compter du 1er janvier 1975, cette fois, l'impôt successoral sera abaissé d'un autre 20 % portant la réduction totale à 40 % de l'impôt qui serait autrement payable en vertu des dispositions générales de la loi. Depuis quelques mois déjà, le conseil des ministres a chargé un comité interministériel d'étudier le régime fiscal des sociétés pétrolières. Ce comité évalue également la contribution du secteur pétrolier à l'économie québécoise et doit faire rapport au cours de l'année. Du côté des compagnies minières, la situation internationale sur le marché des matières premières a considérablement modifié la position des entreprises qui exploitent les ressources minières. Nous procédons actuellement à une analyse de l'imposition de ces entreprises en tenant compte à la fois de leur situation de concurrence et des revenus fiscaux que le Québec est en droit d'exiger en tant que propriétaire de ressources qui deviennent de plus en plus rares et dont la valeur s'accroît. Cette révision tiendra compte des modifications déjà contenues dans la loi fédérale de l'impôt, modifications qui entreront en vigueur en 1976. De plus, le ministre du Revenu présentera également un projet de loi ayant pour objet d'harmoniser la loi fiscale québécoise avec celle du gouvernement fédéral relative aux "corporations de placements hypothécaires." Ce nouveau type de sociétés fut créé en vertu du bill C-135 intitulé Loi créant des mécanismes et des institutions supplémentaires de financement dans le domaine du commerce des hypothèques grevant des propriétés résidentielles au Canada. Par cette mesure, on espère augmenter l'offre des prêts hypothécaires privés. De plus, les fonctionnaires du ministère du Revenu ainsi que ceux du ministère des Finances étudient présentement l'imposition des compagnies de portefeuille, communément appelées compagnies de placements. Ces compagnies sont imposées depuis quelques années déjà en vertu d'un régime spécial qui visait à attirer chez nous la gestion de certains portefeuilles étrangers. À la suite de la réforme fiscale, en particulier de l'imposition des gains de capital, il semble que certains contribuables veuillent utiliser cette disposition comme échappatoire fiscale. Si les études actuellement en cours démontraient que le régime fiscal spécial accordé aux compagnes de placement n'atteint plus l'objectif visé, mon collègue, le ministre du Revenu, présentera les correctifs appropriés. Relance de l'activité économique, assainissement des finances municipales, augmentation des prestations sociales et allégement du fardeau fiscal des contribuables à revenu modeste, tels sont les objectifs que nous avons non seulement poursuivis, mais vraiment réalisés depuis notre accession à la direction des affaires de l'État, en avril 1970. En remerciant mes collègues, ministres et députés, de leur collaboration soutenue dans la poursuite et la réalisation de ces objectifs, c'est avec plaisir que j'annonce à cette Assemblée que, pour la cinquième année consécutive, il n'y aura pas d'augmentation de taxes au Québec. M. le Président bien au contraire, grâce à une saine administration financière et à l'application de politiques de développement économique appropriées, l'équipe du Premier ministre, Robert Bourassa, a pu décréter, pour une troisième année consécutive, des réductions substantielles de taxes à l'avantage de plusieurs dizaines de milliers de contribuables à revenu modeste. Si l'an dernier, lorsque nous avons annoncé ce budget sans taxes, comprenant également des réductions de taxes, on m'a accusé d'avoir des visées électorales, j'espère que, dans cette première année de notre mandat, vous ne nous accuserez pas de la même chose. M. le Président, en tenant compte des modifications fiscales annoncées ce soir, je prévois que les revenus pour l'année 1974/75 atteindront $5,865 millions. Compte tenu des crédits additionnels de $50 millions au titre de l'indexation des traitements et de $38 millions pour l'aide additionnelle aux municipalités, le total des crédits nets s'établira à $6,140 millions, dont $485 millions pour les immobilisations. Je prévois donc un déficit de $275 millions aux comptes budgétaires. Par ailleurs, les opérations extrabudgétaires pour les placements, les prêts et les avances du gouvernement s'élèveront à $158 millions, ce qui signifie que, théoriquement nous aurions besoin de $433 millions pour financer les dépenses budgétaires et extrabudgétaires. Toutefois, en tenant compte des crédits qui ne sont pas utilisés en fin d'année, comme cela se produit régulièrement, je prévois une augmentation de la dette nette de $315 millions environ, soit $84 millions de moins que pour l'exercice qui vient de s'écouler ou qui se terminera dans quelques jours. De plus, nous devrons rembourser $195 millions de dettes échues en 1974/75, dont $80 millions d'obligations d'épargne. Au total, nos besoins bruts de financement pour 1974/75 s'élèveront à $510 millions, soit $165 millions de moins qu'en 1973/74. Tout cela sans tenir compte des décisions qui ont été prises à la conférence des premiers ministres d'hier, de permettre la péréquation des revenus additionnels tirés du pétrole par les provinces productrices. Cette année encore nous lancerons une campagne de vente d'obligations d'épargne. En tenant compte du résultat de cette campagne et des prêts du gouvernement fédéral, je prévois recourir au marché régulier pour environ $315 millions. Évidemment, si la péréquation du pétrole, comme elle a été annoncée hier, se situait dans les environs de $75 à $80 millions, cela améliorerait, à la baisse, nos besoins financiers sur les marchés réguliers. L'Hydro-Québec, pour sa part, prévoit emprunter, au cours de son exercice de 1974, un montant de $550 millions tant pour ses fins propres que pour celles de la Société d'énergie de la baie James. À ce jour, ce programme d'emprunt est réalisé déjà à 40 %. M. le Président, je veux maintenant aborder le sujet des relations économiques et fiscales avec le gouvernement fédéral et ceux des autres provinces. L'aspect le plus important des relations fédérales-provinciales au cours de la dernière année fut, sans aucun doute, la réforme des politiques sociales. Aboutissement de plusieurs années de recherche et d'efforts conjoints dans l'élaboration d'une politique fondée d'abord sur les priorités et les besoins de chaque province les réformes des programmes d'allocations familiales et de régimes de rentes représentent véritablement le fondement d'une politique intégrée de sécurité du revenu. Les nouveaux programmes d'allocations familiales au Québec ont permis, dans le cadre de notre politique de sécurité du revenu, de fournir une assistance plus adéquate aux familles et de reconnaître nos besoins prioritaires dans ce domaine. Ainsi, une mère de deux enfants recevra, cette année, près de $450, soit environ le double de ce qu'elle recevait antérieurement. La mère d'une famille de cinq enfants pourra toucher jusqu'à $2,000, soit près de trois fois le montant dont elle bénéficiait auparavant. De plus, ces allocations seront majorées chaque année en fonction de la hausse du coût de la vie. Et j'ai indiqué plus tôt que ces allocations familiales n'étaient pas taxables. Dans un autre domaine de notre politique sociale, nous avons voulu protéger les personnes retraitées contre une diminution graduelle de leurs revenus réels, suite aux hausses constantes du coût de la vie. Afin d'assurer une coordination des politiques fédérales et provinciales en ce domaine, les deux gouvernements ont conjointement apporté certaines modifications à leurs régimes respectifs. C'est ainsi que fut éliminée la limite à laquelle étaient assujetties les augmentations de prestations afin de permettre une indexation totale à l'indice des prix à la consommation. Les gouvernements ont aussi convenu que les niveaux des gains qui établissaient les taux de cotisation et de prestation seraient augmentés, ceci de façon identique pour le régime de rentes du Québec et celui du Canada. La mise en œuvre de notre politique sociale se poursuit. En vue d'harmoniser le mieux possible ses objectifs avec ceux des autres provinces ainsi qu'avec ceux du gouvernement fédéral, le gouvernement du Québec a l'intention de continuer à apporter sa collaboration la plus étroite à l'élaboration d'une politique sociale qui, tout en respectant les besoins et les priorités de notre population, serait en harmonie avec les politiques des autres provinces. Dans le cadre de la renégociation du financement des programmes de santé et d'enseignement post-secondaire, nous avions fait des propositions précises qui auraient assuré le Québec d'une autonomie fiscale définitive pour le financement de ces programmes. Dans les propositions qu'i! a soumises à l'approbation des provinces, le gouvernement fédéral reconnaissait que l'élaboration et la mise en œuvre des programmes de santé et d'enseignement post-secondaire étaient de la compétence entière des provinces. De plus, le financement de ces programmes devait s'effectuer en procurant aux provinces les revenus nécessaires sous forme de transfert fiscal; ces transferts tiendraient compte des disparités de rendement des impôts entre les provinces. En d'autres mots, ils seraient péréquatés. Alors que le gouvernement fédéral et la majorité des provinces s'accordaient sur les principes fondamentaux qui devaient être respectés, l'on n'a pas réussi à réaliser un accord sur les modalités d'application. Le gouvernement fédéral, dans le but évident d'exercer un contrôle sévère sur le rythme de croissance de ses propres dépenses, proposait aux provinces une formule de partage qui aurait éventuellement limité le rythme de croissance de sa contribution à celui du produit national brut. De plus, il associait à ce mécanisme un transfert fiscal d'une importance si faible qu'il ne pouvait permettre au Québec, comme à plusieurs autres provinces d'ailleurs, d'en arriver à une autonomie fiscale authentique avant plusieurs années. Face à cette situation, le gouvernement fédéral et les provinces optèrent pour un renouvellement des accords existants concernant le financement de l'enseignement postsecondaire. Pour ce qui est du financement des programmes de santé, la proposition fédérale demeure. Le gouvernement du Québec, toutefois, ne peut l'accepter à moins qu'elle ne soit modifiée sensiblement dans le sens de sa proposition. L'évolution actuelle des coûts et l'inflation que doit subir le secteur public accentuent le bien-fondé de notre position. J'ai déjà traité de la situation énergétique et de ses effets sur l'économie québécoise. Une autre des conséquences sérieuses que cette crise pourrait avoir concerne la péréquation des recettes fiscales. À plusieurs reprises, en effet, le ministre fédéral des Finances avait exprimé les craintes de son gouvernement quant aux conséquences que la crise internationale du pétrole pourrait avoir sur les paiements fédéraux au titre de la péréquation. Selon lui, les obligations financières du gouvernement fédéral pourraient être telles ou auraient pu être telles qu'elles l'auraient forcé à accroître les impôts. Lors de la conférence nationale sur l'énergie tenue en janvier dernier, le premier ministre du Québec a insisté sur la nécessité de sauvegarder l'intégrité du principe même de la péréquation. À cet effet, il déclarait: « Il serait pour le moins contradictoire de songer à remettre en question un mécanisme aussi fondamental au financement de la fédération canadienne que celui de la péréquation alors que ce mécanisme lui-même devrait être utilisé pour corriger, au moins partiellement, les séquelles de la crise actuelle. La situation devant laquelle nous nous trouvons, disait-il, actuellement ne justifie aucunement une modification au principe même de la péréquation, pas plus qu'un recul vis-à-vis les améliorations qui ont été péniblement acquises depuis son instauration en 1957. » Le relèvement du prix du pétrole canadien à un niveau supérieur à ce qu'il était antérieurement ne signifiait pas et ne signifie pas nécessairement - nous l'avons répété à plusieurs reprises - une augmentation équivalente des droits et taxes provinciales sur le pétrole assujettis à la péréquation. Ce n'est pas une raison suffisante, avons-nous dit, pour le gouvernement fédéral d'apporter, et ce de façon unilatérale, des modifications à la formule de péréquation s'appliquant à ces sources de revenu. Encore moins acceptable aurait été une reformulation en profondeur du mécanisme de la péréquation qui aurait eu pour conséquence de retarder, sinon de remettre en cause le partage équitable des richesses du pays. D'ailleurs, les modifications apportées à cette formule depuis son instauration ont toujours été le fruit d'un effort de coordination entre le gouvernement fédéral et les provinces. Il en fut ainsi lorsque les revenus de l'impôt foncier scolaire ont été inclus dans la formule de péréquation; il en fut de même en 1962 lorsqu'ont été inclus les revenus des richesses naturelles. Cette dernière modification visant d'ailleurs à rendre la formule plus équitable en évitant que des provinces puissent à la fois toucher des paiements de péréquation et se classer en même temps parmi les provinces riches du fait des revenus qu'elles tirent de leurs richesses naturelles. Vouloir exclure ces revenus du mécanisme de péréquation pourrait représenter un retour à la situation peu équitable qui prévalait antérieurement. C'est pourquoi il y a lieu de se réjouir des résultats de la conférence des premiers ministres qui s'est tenue hier, à Ottawa. La solution à laquelle ils en sont arrivés représente une victoire importante pour le fédéralisme canadien. Cet accord prévoit en particulier que la part des revenus que conserveront les provinces productrices de pétrole pour leurs fins budgétaires sera soumise à la péréquation. En accédant à nos demandes répétées de ne pas modifier la formule de péréquation, le gouvernement du premier ministre Pierre Elliott Trudeau illustre sa volonté de poursuivre sa politique de répartition équitable des richesses du pays. Le Discours sur le budget est un événement qui est attendu avec un certain intérêt en raison de l'impact qu'il peut avoir sur la fiscalité, ce qui intéresse tout le monde. En outre, pour l'observateur, M. le Président, cela ne me surprend pas. Le Parti québécois n'a jamais été intéressé par les questions d'argent, de budget, et la dernière élection en a été la preuve. M. le Président, pour l'observateur de la scène politique, l'exposé budgétaire a des dimensions non moins importantes car il est l'occasion de définir plus en détailla situation financière du gouvernement ainsi que les secteurs particuliers d'intervention. Grâce aux mesures proposées dans le Discours inaugural et aussi à celles que je viens d'annoncer ce soir, l'exercice financier qui commence s'inscrit dans la poursuite de l'action entreprise depuis 1970. Une analyse rapide de l'évolution de la politique budgétaire au cours des dernières années démontre clairement que le Québec a utilisé son budget comme outil de développement économique. Au cours des exercices financiers 1971/72 et 1972/73, la situation de l'emploi militait en faveur d'une intervention dynamique de l'État en vue de la relance de l'économie. C'est pourquoi nous avons augmenté de façon substantielle nos dépenses d'immobilisation, lesquelles ont eu des retombées en termes de création d'emplois et ont servi à relancer de nombreuses industries du secteur privé. Ainsi n'avons-nous pas hésité à présenter à cette Assemblée des budgets largement déficitaires où les dépenses d'immobilisation furent financées presque en totalité au moyen d'emprunts. Maintenant que la situation se redresse et que les pressions inflationnistes se font plus pressantes, notre politique budgétaire a dû être adaptée à cette conjoncture nouvelle. C'est pourquoi nous avons décidé de financer, en 1973/74, près de la moitié de nos dépenses en capital à même nos revenus. Notre objectif est le même pour 1974/75, tout en maintenant un haut niveau d'activité dans ce domaine. Ce sont là des faits qui démontrent bien que le gouvernement actuel a appliqué une politique budgétaire et fiscale conforme à la conjoncture économique. En outre, grâce aux techniques les plus modernes de gestion budgétaire, nous avons introduit des mesures de contrôle financier qui ont fait en sorte que notre situation à ce chapitre est des plus saines. Ceci n'est pas étranger au fait que notre dette obligataire per capita soit plus basse que celle de la moyenne des provinces canadiennes. Une autre ligne de force de notre politique budgétaire, au cours des dernières années, est sans contredit l'aide au secteur municipal. En l'espace de cinq ans, les transferts financiers et fiscaux du gouvernement du Québec aux municipalités ont été multipliés par trois, ce qui illustre bien l'ampleur du chemin parcouru. Certes, des municipalités doivent faire face à des situations spéciales et c'est notre intention bien arrêtée de continuer à les aider en répondant à des besoins particuliers et pressants. Mais il faut toutefois se rendre compte qu'entre ce qui est souhaitable et ce qu'il est possible de réaliser financièrement, il y a un écart qu'il importe de bien mesurer. En définitive, c'est le contribuable qui paie la note et toute administration publique doit mesurer soigneusement le rythme du développement des services qu'elle offre pour tenir compte de la capacité, mais aussi de la volonté de payer des contribuables. Enfin, pour une troisième année consécutive, nous décrétons des baisses substantielles d'impôt pour des dizaines de milliers de contribuables, surtout ceux à revenu modeste. M. le Président, à ces réductions de taxes, ajoutons - j'en énumère seulement quelques-unes – les mesures qui ont été mises en application par le gouvernement Bourassa: le programme d'allocation familiales majorées, la non-imposition des allocations fédérales et québécoises, la Loi des petites créances, l'aide juridique, l'assurance-maladie et l'assurance pour les soins dentaires des jeunes enfants, le contrôle des prix des loyers, la Loi du syndicalisme agricole, la Loi de la protection du consommateur, les relèvements successifs du salaire minimum, l'augmentation et l'indexation des prestations sociales et des salaires, etc. En somme, parallèlement aux mesures de développement économique qui assurent de l'emploi et un meilleur revenu aux travailleurs québécois, les mesures à caractère social ont été et demeurent la principale préoccupation, la marque de commerce du gouvernement Bourassa, c'est-à-dire d'un gouvernement sensible aux problèmes des petites gens, des travailleurs à revenu modeste, bref, des personnes qui ont besoin de l'aide de l'État. M. le Président, c'est par des gestes concrets que l'on doit identifier l'idéologie politique d'un gouvernement. Je soumets donc, M. le Président, que le Premier ministre a bien raison de dire que son gouvernement en est un dont la philosophie politique est celle de la véritable social-démocratie. M. le Président, conformément à l'article 127, paragraphe 1, je propose que l'Assemblée nationale approuve la politique budgétaire du gouvernement.