Province Législature Session Type de discours Date du discours Locuteur Fonction du locuteur Parti politique Québec 30e 3e Discours du budget 17 avril 1975 M. Raymond Garneau Ministre des Finances PLQ M. Garneau : M. le Président, de nos jours, les mécanismes budgétaires ne peuvent plus avoir pour unique objectif le financement des charges administratives de l'État; ils deviennent des moyens d'intervention que le gouvernement utilise pour atteindre ses objectifs économiques et sociaux. Cette conception moderne des finances publiques s'applique tant au niveau des revenus qu'au niveau des dépenses. J'exposerai ce soir le cadre et les objectifs de la politique budgétaire et fiscale du gouvernement du Québec pour l'exercice 1975/76 ainsi que les divers moyens que nous voulons mettre en œuvre pour les réaliser. En déposant les crédits budgétaires, le 25 mars, un premier volet de cette politique a été dévoilé. L'exposé de ce soir en constitue l'autre facette, c'est-à-dire l'aspect fiscal. En annexe au discours, on trouvera également une série de tableaux et de graphiques. Les uns expliquent davantage les mesures fiscales annoncées ce soir; les autres résument les comptes de l'État ou fournissent certaines données économiques de base. Depuis quelques mois, notre économie fait face à deux sources opposées de tension. D'un côté, les pressions inflationnistes demeurent inquiétantes et ne semblent pas devoir se résorber totalement. De l'autre, la diminution de la demande entraîne un certain ralentissement de la croissance de l'économie, lequel se traduit en une augmentation moins rapide de l'emploi. Dans la plupart des pays industrialisés, l'inflation a atteint des niveaux peu enviables en 1974, comme le démontrent les chiffres publiés par l'OCDE: 11.5% aux États-Unis, 25% au Japon, 13.7% en France, 7.5% en Allemagne, 19.2% en Italie, 14.7% au Royaume-Uni et finalement 10.9% au Canada. Cette flambée fut en bonne partie déclenchée en 1973 par une hausse subite et prononcée des prix du pétrole, ainsi que des matières premières industrielles et alimentaires. Au cours des derniers mois, cependant, les prix de plusieurs produits de base ont cessé de monter, tandis que d'autres ont subi des diminutions sensibles. C'est ainsi que les prix de la plupart des matières premières industrielles ont chuté considérablement au cours du deuxième semestre de 1974, tandis que les produits alimentaires ont récemment amorcé une certaine baisse. Enfin, les derniers mois semblent indiquer que ces diminutions commencent à se répercuter sur les prix de certains biens de consommation courante. Sans négliger pour autant les perturbations que provoque l'inflation dans les divers secteurs de l'économie, notre principal souci en ce moment demeure le ralentissement de la croissance. Amorcé par une détérioration du commerce extérieur canadien en raison de la récession mondiale et amplifié par l'inquiétude des consommateurs. Ce ralentissement s'est graduellement propagé à l'ensemble de l'économie. Face à cette conjoncture, le gouvernement se doit d'intervenir dans la mesure de ses moyens, par une politique budgétaire et fiscale expansionniste. Cette option expansionniste se traduira non seulement dans nos opérations budgétaires, mais aussi dans tous les secteurs sur lesquels le gouvernement exerce une influence directe. Ainsi, outre un déficit sensiblement augmenté par rapport aux deux dernières années, on notera une hausse marquée de l'ensemble des investissements publics. Le gouvernement, comme vous le savez, n'agit pas seulement sur ses propres dépenses, mais aussi, grâce à des autorisations, garanties d'emprunts ou subventions, sur une tranche importante des investissements de l'ensemble du secteur public. Au cours des dernières années, ces investissements ont cru à un rythme relativement moins élevé que ceux du secteur privé. L'économie québécoise était alors en pleine expansion, et une intervention plus forte du secteur public n'eut pas été souhaitable. La situation actuelle est cependant différente. Face à un certain ralentissement de la demande, plusieurs entreprises retardent leurs investissements dans l'attente d'une conjoncture plus propice. A partir de données récentes de Statistique Canada, on estime à 7.3% la croissance des investissements privés au Québec pour 1975, comparativement à 25% en 1974 et à 21% en 1973. Cette situation exige l'intervention de l'État. On se souviendra qu'en 1971, devant le retard de la reprise économique, nous avions décidé de hausser fortement les investissements publics. Cette année, les investissements des secteurs public et para public croîtront de 40% pour atteindre $3 milliards et permettre la création ou le soutien de plus de 150,000 emplois. Le programme d'investissements de l'Hydro-Québec et de la Société de l'énergie de la Baie James, par exemple, devrait atteindre $1,065 millions en 1975, comparativement à $615 millions en 1974, soit une augmentation de $450 millions ou près de 75%. Ce programme d'investissements permettra à plusieurs entreprises québécoises de maintenir un niveau raisonnable de production et d'embauche. De même avons-nous augmenté les avances à la Société d'Habitation du Québec, pour qu'elle puisse contribuer à amorcer la reprise dans le secteur de la construction de logements. En outre, ainsi que l'indiquait l'annexe à ma déclaration ministérielle, de décembre dernier, notre Loi sur les impôts sera modifiée pour adoucir les normes de déduction de l'amortissement des nouveaux immeubles à loyers multiples mis en chantier entre le 18 novembre 1974 et le 31 décembre 1975. Mais face à la conjoncture actuelle, une action uniquement centrée sur les investissements ne saurait être suffisante; elle doit se doubler d'une politique de soutien du revenu dans le but de stimuler la consommation des ménages. Reconnaissant cette nécessité, le gouvernement a décidé de réduire de façon massive 1’impôt sur le revenu des particuliers. En agissant de la sorte, il compte aussi atténuer les pressions inflationnistes provenant du gonflement des coûts de production. En effet, le comportement des agents économiques, au cours des dernières années, confirme de plus en plus que ces derniers perçoivent les charges fiscales comme des coûts et non comme le prix des services publics qu'ils reçoivent, de telle sorte que le revenu après impôt devient la base de calcul de leurs revendications. Dans cette optique, les allégements fiscaux que je vais annoncer visent à concilier les objectifs de soutien de la demande et de la lutte à l'inflation. Cette préoccupation ne doit pas laisser en veilleuse, toutefois, d'autres priorités tout aussi importantes. Ainsi, l'exposé budgétaire de ce soir poursuit-il quatre objectifs principaux: 1) Le soutien de l'activité économique par des réductions fiscales massives visant tous les Québécois, surtout les contribuables à revenu moyen ou modeste. 2) La poursuite d'une politique de modernisation de notre structure industrielle et de promotion des petites et moyennes entreprises. 3) Le parachèvement de la réforme de la fiscalité minière entreprise en décembre dernier. 4) L'amélioration des finances municipales grâce à l'augmentation des transferts fiscaux et à des subventions accrues. Avant d'annoncer les diverses mesures touchant l'impôt sur les revenus des particuliers, il convient d'exposer brièvement les principes qui nous ont guidés dans leur élaboration. On se rappellera que, l'an dernier, au lieu de procéder à une baisse générale de l'impôt sur le revenu des particuliers par des mécanismes automatiques comme l'indexation, le gouvernement avait proposé des réductions sélectives pour les contribuables à revenu modeste et un programme d'allocations familiales accrues et non imposables. Ces mesures budgétaires et fiscales de 1974 ont entraîné, pour le trésor provincial, des frais plus élevés que n'aurait coûté l'uniformisation de l'impôt québécois à l'impôt fédéral, y compris l'indexation. Ce choix découle de la philosophie sociale du gouvernement, qui vise à une meilleure répartition des revenus, de façon à permettre aux moins fortunés et à ceux qui ont charge de famille, de maintenir et même d'augmenter leur pouvoir d'achat; l'indexation eut davantage favorisé les contribuables à revenu élevé. Conformément à cette optique de démocratie sociale, nous proposons des réductions substantielles de l'impôt dont profitera l'ensemble des Québécois et qui rétabliront un meilleur équilibre entre l'imposition des trois grandes catégories de revenus, soit les revenus d'emplois, les revenus d'entreprises et les revenus de placements. En conséquence, nous demanderons à cette Assemblée d'approuver les mesures suivantes, rétroactivement au 1er janvier 1975: - l'augmentation de l'exemption pour personnes imposées comme célibataires, de $1,500 à $1,600; - l'augmentation de l'exemption pour personnes imposées comme mariées, de $2,850 à $3,500; - l'augmentation de la limite à la déduction générale pour les frais encourus dans l'exercice d'un emploi, de $150 à $500; - l'abolition du taux actuel de 10% sur la première tranche de $2,000 de revenu imposable; et -le remplacement des taux actuels par un taux uniforme de 16% pour le revenu imposable compris entre $2,000 et $9,000. L'augmentation des exemptions et du maximum de la déduction générale pour les frais encourus dans l'exercice d'un emploi ainsi que les modifications à la structure des taux qui représentent une réduction de l'impôt provincial sur le revenu pour tous les Québécois. Chose plus importante encore et qui traduit bien la philosophie sociale du gouvernement, environ les trois quarts de cette diminution, qui totalise $340 millions, seront répartis entre les contribuables dont le revenu est inférieur à $10,000. Même si ces allègements fiscaux profiteront à l'ensemble des Québécois, ils avantageront tout spécialement les contribuables à revenu modeste et les classes moyennes. Ainsi, tous les salariés imposés comme célibataires et dont le revenu est inférieur à $6,000, ainsi que tous ceux qui sont imposés comme mariés et dont le salaire est inférieur à $9,000 profiteront de réductions variant de 30% à 100% de leur impôt provincial sur le revenu. La majoration des exemptions et surtout l'abolition de l'impôt sur les premiers $2,000 de revenu taxable feront que 300,000 Québécois s'ajouteront au groupe de ceux qui n'ont pas à payer d'impôt. C'est ainsi qu'un déclarant célibataire dont le salaire est inférieur à $3,931, et qu'un déclarant marié dont le salaire est inférieur à $5,957, ne paieront aucun impôt provincial, en 1975, alors que selon le régime d'imposition de 1974, les salaires non imposables auraient été respectivement de $2,758 et de $5,514. Qu'il me soit permis d'ajouter que selon le régime fédéral en vigueur en 1975, après l'avoir indexé deux fois, les niveaux de salaire comparables sont de $3,583 pour le déclarant célibataire et de $5,325 pour le déclarant marié. De plus, dès le 1er juillet, les retenues à la source seront modifiées pour tenir compte de ces allégements fiscaux. Cela signifie que pour l'année d'imposition 1975, la moitié de la réduction d'impôts entraînera une diminution des retenues à la source, tandis que l'autre partie prendra la forme d'un remboursement d'impôt. À titre d'exemple, un salarié marié gagnant mensuellement $500 verra son salaire net augmenté de $19 par mois à compter de juillet et recevra un remboursement de $115 au moment de la production de sa déclaration d'impôt pour l'année 1975. L'allégement équivaudra à une majoration de près de 4% du salaire net de ce contribuable. M. le Président, lors de la discussion des crédits du ministère des Finances, l'an dernier, mon collègue, le Dr Lecours, député de Frontenac, avait soulevé le problème des retenues à la source pour les travailleurs qui, suivant leur niveau de revenus n'avaient pas, en définitive, d'impôt à payer. J'avais répondu, à ce moment, au député de Frontenac, que nous allions étudier l'aspect technique du problème et tenter de trouver une solution. Je suis donc heureux, ce soir. de souligner que le régime proposé éliminera les difficultés que soulevait l'ancien alors que certaines personnes exonérées d'impôt devaient quand même subir des déductions à la source et attendre à l'année suivante pour profiter effectivement de l'exclusion, ce qui ne se reproduira plus maintenant. Bref, M. le Président, du point de vue social, il est évident que ces réductions fiscales sélectives seront bien supérieures à l'indexation automatique. Elles le seront également du point de vue économique puisqu'elles contribueront à soutenir davantage la demande pour les biens de consommation. En effet, les classes moyennes et modestes sont plus susceptibles de retourner" directement dans le circuit économique les sommes ainsi mises à leur disposition que ne le sont les classes plus aisées. M. le Président, pour bien démontrer l'impact des mesures que nous proposons ce soir, comparativement à l'indexation pure et simple de la structure Québécoise de l'impôt, je voudrais référer cet auditoire au tableau annexé au discours sur le budget où une analyse technique a été préparée pour comparer l'effet des mesures proposées ce soir à ce qu'aurait donnée l'indexation pure et simple. Ce tableau traduit d'une façon éloquente également pourquoi nous soumettons que l'approche du gouvernement québécois sur le plan social est définitivement supérieur à l'indexation automatique. Ainsi, un contribuable imposé à titre de marié, gagnant $6,000, bénéficierait, en 1975, avec l'indexation, d'une baisse d'impôt de $13 alors que les mesures que je viens d'annoncer signifieront pour lui une baisse de taxe de $229. Toujours, M. le Président, de ce tableau de la page 47, on voit que le contribuable, dans la même situation, gagnant $9,000, bénéficierait, en vertu de l'indexation, d'une baisse d'impôt de $81 alors que la proposition du gouvernement Bourassa lui donnera une diminution de taxe de $180. Pour le même contribuable, gagnant $15,000, l'avantage existe encore. L'indexation 1ui aura donné $184 alors que le régime que nous proposons signifiera pour ce contribuable, une baisse de $214 d'impôt. Par contre, M. le Président, un contribuable imposé à titre de marié et gagnant $25,000, aurait bénéficié d'une baisse de taxe de $278 avec l'indexation alors que notre proposition signifiera pour lui une baisse de $250. C'est donc dire qu'en vertu du régime proposé, nous avantageons les contribuables à revenus modestes et moyens alors que les contribuables à gros revenus auraient davantage été favorisés par l'indexation. Pour ce qui est maintenant des contribuables imposés comme célibataires et qui gagnent $5,000 par année, ils auront une baisse de taxe cinq fois plus grande, avec notre système, qu'avec l'indexation. Ceux gagnant $9,000 se trouveront en situation presque égale et ceux gagnant plus que $9,000 auraient été davantage favorisés par l'indexation comparée à notre proposition. Cela confirme encore davantage le choix que nous avons fait, lequel favorise les classes moyennes et modestes beaucoup plus que ne l'aurait fait l'indexation. On a également beaucoup parlé de l'alignement du régime québécois de l'impôt au régime fédéral et à celui des autres provinces. L'Opposition officielle, entre autres, nous demandait de faire un tel alignement. J'attirerai l'attention des honorables députés de cette Chambre sur le tableau de la page 48, où une analyse technique a été faite, laquelle tient compte du revenu disponible de diverses catégories de contribuables en leur appliquant les dispositions du régime fédéral qui est en application dans les autres provinces et également le régime québécois. Il ressort de cette analyse que tous les contribuables mariés ayant six enfants à leur charge sont nettement avantagés par le régime québécois comparativement à celui du fédéral. Pour les contribuables mariés avec quatre enfants, l'avantage du régime québécois se vérifie jusqu'à un revenu de $25,000 par année. Dans certains cas l'écart est aussi haut que $375. Pour les gens mariés ayant deux enfants à charge, le régime québécois, en termes de revenu disponible pour le contribuable, avantage tous les contribuables imposés à ce titre qui gagnent $15,000 et moins. Les gens mariés sans enfant sont avantagés par le régime s'ils gagnent $14,000 et moins. Pour ce qui est des célibataires, le niveau de revenu qui se trouve avantagé par le régime québécois se situe à $9,000 et moins. Que ce soit en termes absolus ou que ce soit en termes relatifs, en comparant les deux régimes, le tableau de la page 48 démontre clairement la philosophie sociale du gouvernement qui a animé notre gouvernement dans ses choix budgétaires et fiscaux, lesquels ont pour but de favoriser les classes à revenus moyen et modeste, en particulier celles qui ont les responsabilités ou charge de famille. Dans ma déclaration ministérielle du 19 décembre dernier, j'ai annoncé l'exemption des premiers $1,000 de revenus d'intérêts et l'instauration d'un régime enregistré d'épargne-logement. Ces mesures, appliquées à compter de janvier 1974, favoriseront l'épargne personnelle et aideront au financement de nombreux projets d'investissement tant privés que publics. En vue d'intéresser les Québécois au marché boursier nous proposons que, rétroactivement au 1er janvier 1975, le revenu de dividendes d'entreprises canadiennes soit englobé dans l'exemption de $1,000 qui, en 1974, ne s'est appliquée qu'aux revenus d'intérêts. Quant à l'épargne-logement, suite aux interventions faites auprès d'Ottawa, le gouvernement fédéral a accepté, à l'instar de celui du Québec, que les dépôts confiés aux caisses populaires soient admissibles à ce régime. Ce n'est là que justice pour ces institutions qui préconisent l'accumulation de l'épargne en vue de faciliter l'accès à la propriété. Maintenant que des avantages fiscaux sont étendus à l'épargne-logement, il n'est que normal que les caisses populaires puissent bénéficier d'un programme leur permettant de poursuivre leur activité dans un domaine où elles ont toujours excellé. Incidemment, il convient de rappeler le 75e anniversaire des Caisses populaires Desjardins qui ont le grand mérite d'avoir été parmi les premières institutions financières à offrir à leurs membres des prêts hypothécaires à des conditions avantageuses. En signalant cet anniversaire, je forme le vœu qu'elles poursuivent encore longtemps l'œuvre du Commandeur Desjardins. Bien que l'exemption de $1,000 de revenus d'intérêts et de dividendes permette de compenser de façon substantielle l'érosion de l'épargne due à l'inflation, il convient d'accorder une protection additionnelle aux personnes dont la majeure partie du revenu provient d'une pension de retraite. C'est pourquoi nous exempterons, à compter du 1er janvier 1975, le premier $1,000 de tel revenu. Les bénéficiaires de ces pensions, ainsi que les personnes ayant atteint l'âge de 65 ans et qui touchent une rente provenant d'un régime enregistré d'épargne retraite ou des prestations provenant d'un régime de participation différée aux bénéfices, pourront profiter de cette exemption. Toutefois, les prestations versées en vertu du régime de la sécurité de la vieillesse, du supplément de revenu garanti, du Régime de pensions du Canada ou du Régime des rentes du Québec, ne seront pas admises à cette exemption. Afin de contribuer encore davantage à l'amélioration de la situation financière des personnes âgées, l'exemption qui leur est appliquée et qui n'est pas utilisée par celle-ci, pourra être transférée à son conjoint. Cette exemption, qui s'élevait antérieurement à $650, est maintenant de $1,000, suite à une modification apportée l'an dernier. Grâce à tous ces allégements, le revenu d'un couple âgé, qui tire normalement sa subsistance de régimes de retraite et d'intérêts ou dividendes sur des épargnes accumulées au cours des années, pourra atteindre $10,100 avant de devenir imposable. Ces personnes pourront ainsi profiter de leur retraite avec plus de sérénité. L'ensemble des mesures destinées à encourager l'épargne et à adoucir le régime fiscal des personnes âgées, réduira l'impôt provincial sur le revenu de $80 millions pour 1975. Ce montant s'ajoute à l'allégement de $340 millions au titre de soutien du revenu, soit un total de $420 millions ou plus de 15% de l'impôt qui aurait été autrement payable en 1975. M. le Président, je pense que c'est la première fois dans l'histoire du Québec qu'une baisse d'impôt aussi importante est annoncée à l'occasion d'un discours du budget. Tous ces allégements fiscaux que je viens d'annoncer et qui s'ajoutent, comme on le sait, à une série de mesures visant à favoriser l'épanouissement de nos exploitations agricoles. Est-il, en effet, besoin de rappeler que la classe agricole jouit d'un régime fiscal particulier: exemption de la taxe de vente sur la machinerie agricole et de la taxe sur les carburants utilisés pour l'exploitation de la ferme, remboursement d'une partie de l'impôt foncier municipal et scolaire, régime spécial concernant les impôts sur la transmission des biens, etc. Le gouvernement du Québec, reconnaissant le rôle essentiel de l'agriculture dans l'ensemble de son économie, a décidé de présenter à cette Assemblée un projet de loi ayant pour objet d'assurer aux cultivateurs une plus grande stabilité de revenus en appliquant des mécanismes qui feront en sorte que ceux-ci puissent se comparer à ceux des ouvriers spécialisés. Comme je l'ai indiqué lors du dépôt des crédits budgétaires, le projet de loi qui sera présenté par mon collègue, le ministre de l'Agriculture, prévoira, pour la première année d'application, que les sommes nécessaires seront puisées à même le fonds consolidé du revenu. Rappelons que, pour l'exercice 1974/75, des mesures supplémentaires de soutien du revenu agricole ont entraîné des déboursés de plus de $30 millions. En plus de certaines mesures d'harmonisation de nos lois fiscales avec celles du gouvernement fédéral et des autres provinces, qui feront l'objet d'amendements présentés par le ministre du Revenu, d'autres modifications seront apportées à notre régime fiscal. Dans le cadre d'un mouvement amorcé en 1972, l'impôt successoral sera abaissé d'une autre tranche de 20% à compter du 1er janvier 1976, portant ainsi la réduction totale à 60% de l'impôt qui serait autrement exigible en vertu des dispositions générales de la loi. Il convient également d'alléger sensiblement l'impôt sur les dons, destiné à empêcher le morcellement indu des patrimoines et à protéger ainsi le rendement de l'impôt successoral. Comme ce dernier a été réduit, il semble raisonnable d'apporter certains adoucissements à l'impôt sur les dons, qui s'appliqueront à compter du 1er janvier 1975. Premièrement, augmentation de $10,000 de l'exemption pour les dons faits au conjoint, la portant ainsi de $5,000 à $15,000. Augmentation de $1,000 de l'exemption pour les dons faits à un donataire autre que le conjoint, la portant ainsi de $2,000 à $3,000, avec maximum de $15,000 au lieu de $10,000. M. le Président, pour tenir compte de la hausse des prix, l'exemption de la taxe de vente sur les menus articles est portée de $0.15 à $0.25 et l'exemption de la taxe sur les repas est augmentée de $1.49 à$2. Ces allégements prendront effet, à compter de minuit ce soir. Dans un autre ordre d'idées, j'aimerais souligner qu'afin d'assurer le financement de la Régie de l'assurance-dépôts du Québec, une prime de 1/30 de 1% sera imposée aux institutions financières sur tous les dépôts sujets à la garantie offerte par la Loi de l'assurance-dépôts. Les modalités d'application de cette prime feront l'objet d'un projet de loi qui sera présenté au cours de l'année par mon collègue le ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives. Enfin, pour encourager la conservation de l'énergie, les droits d'immatriculation des véhicules de promenade à forte consommation seront augmentés à compter de 1976. Ainsi, le taux actuel de $0.01 la livre continuera de s'appliquer sur les premiers 3,000 livres, mais il sera porté à $0.02 entre 3,000 et 4,000 livres et $0.03 au-delà de 4,000 livres. Cette mesure ne s'appliquera pas aux voitures-taxis. Elle affectera surtout les propriétaires de grosses voitures, laissant totalement inchangés les droits d'immatriculation des automobiles plus économiques. Dans ma déclaration ministérielle du 19 décembre dernier, j'avais annoncé que nous ne reporterions pas au-delà du 31 mars 1975, l'exemption de la taxe de vente sur la machinerie industrielle acquise par les entreprises manufacturières. Depuis lors, les prévisions d'investissement du secteur manufacturier pour 1975, indiquent un taux de croissance sensiblement plus faible par rapport aux années précédentes. En conséquence, nous avons décidé de reconduire cette mesure pour deux années additionnelles. Ainsi, la loi sera amendée, pour préciser que l'achat de machinerie industrielle effectué entre le 19 avril 1972 et le 1er avril 1977 sera exempté de la taxe de vente en détail si la livraison en est faite à l'acheteur avant le 1er avril 1977. L'an dernier, nous avions manifesté notre intention de procéder à une réévaluation de la Loi favorisant le développement industriel au moyen d'avantages fiscaux. Cette loi vise deux objectifs, accélérer la transformation de la structure industrielle québécoise, en favorisant l'implantation d'entreprises fabriquant des biens de conception nouvelle et utilisant une technique moderne, et également promouvoir le développement des régions excentriques, en accordant des dégrèvements fiscaux plus élevés aux entreprises manufacturières qui y font des investissements. Depuis la mise en application de cette mesure les investissements admissibles ont dépassé $500 millions. Ce sont surtout les projets réalisés dans les secteurs dynamiques qui ont bénéficié de l'aide accordée. Étant donné que cette mesure exerce un effet positif sur l'amélioration de la structure industrielle québécoise, elle sera maintenue pour une période additionnelle de deux ans. Pour les mêmes motifs de renforcement de notre structure industrielle, l'amortissement accéléré des investissements en machinerie et équipement dans le secteur manufacturier sera prolongé pour une période indéterminée. Il en sera de même du matériel antipollution Pour l'année 1975, ces mesures auront pour effet de réduire de $15 millions la charge fiscale des entreprises de ces secteurs. Toutes ces mesures d'incitation au développement industriel s'appliquent aux entreprises de fabrication indépendamment de leur taille. Il importe toutefois de faire davantage pour les nombreuses petites et moyennes entreprises québécoises qui jouent un rôle de premier plan dans notre économie. Pour juger de leur importance, qu'il suffise de mentionner qu'elles furent responsables, au cours de la dernière décennie, de la création de plus de 90% des nouveaux emplois dans le secteur manufacturier québécois. Des études, menées par le ministère de l'Industrie et du Commerce ainsi que par différents corps publics, dont la Chambre de commerce de la province de Québec, ont démontré que deux problèmes majeurs constituent habituellement un obstacle à la croissance des petites et moyennes entreprises. Il s'agit, d'abord, de la qualité de la gestion que l'on trouve dans la majorité d'entre elles; satisfaisante au démarrage, elle devient souvent inadéquate avec le temps et la croissance de l'entreprise. L'autre problème, qui a été porté à notre attention, est celui qui se pose lorsque l'entreprise a besoin de capital de risque pour accélérer sa croissance ou lancer un produit nouveau. Bien qu'il existe un certain nombre d'institutions spécialisées dans l'offre de capital de risque, et malgré la contribution de la Société de développement industriel, les petites et moyennes entreprises, dont le financement traditionnel est assuré par le prêt garanti, se trouvent parfois dans l'impossibilité d'obtenir le capital de risque nécessaire à leur expansion. Pour pallier ces problèmes, le gouvernement propose la création d'un nouveau type d'institutions financières, appelées « Sociétés pour le développement de l'entreprise québécoise ». Ces sociétés se spécialiseront dans l'offre de capital de risque aux petites et moyennes entreprises du secteur manufacturier. Comme elles offriront du capital-actions ou des prêts non garantis, ces sociétés financières seront fortement incitées à collaborer à la gestion des entreprises dans lesquelles elles auront investi. En vue de canaliser les fonds vers ce nouveau type d'institutions financières, qui prendront des risques incontestables, des avantages fiscaux seront consentis à ces sociétés et à leurs actionnaires. Les modalités de fonctionnement et les structures de ces nouvelles institutions, de même que les avantages fiscaux s'y rattachant seront définis par législation. Au départ, le gouvernement entrevoit la création d'un nombre limité de SODEQ. Cela devra se faire dans le cadre d'expériences pilotes mettant en évidence le caractère régional qu'il veut conférer à ces sociétés de développement. J'aimerais maintenant aborder le vaste problème de la fiscalité minière. La révision du régime d'imposition des compagnies minières a donné lieu à l'annonce d'une modification provisoire de la structure des taux des droits sur les mines pour la période du 1er avril 1974 au 31 mars 1975. Il convient maintenant de présenter les modifications de nature plus permanentes que le gouvernement du Québec a l'intention d'apporter à l'imposition des compagnies minières. Le prélèvement de droits sur les mines vise à permettre à la population de recevoir une juste rémunération pour l'utilisation de ses richesses naturelles. Toutefois, il importe d'assortir ces droits d'autres mesures destinées à inciter l'exploration, à favoriser la croissance et le développement du secteur minier et à encourager une transformation plus poussée du minerai, de la simple concentration jusqu'au stade de la fabrication de produits finis. Dans l'élaboration d'une nouvelle politique d'imposition minière, il a forcément fallu tenir compte du régime fiscal en vigueur dans les autres provinces et de certaines contraintes propres à l'économie minière québécoise. Ainsi, faut-il se rappeler que l'exploitation minière a permis non seulement le développement de régions, qui seraient autrement demeurées désertes, mais aussi la création d'une industrie de transformation des métaux qui est maintenant l'une des composantes principales de notre structure industrielle. On a souvent tendance à oublier que notre capacité de transformation de certains métaux est égale ou même supérieure au volume de minerai extrait du sous-sol québécois. Dans certains cas, nous devons importer des autres provinces, même de l'étranger, une partie du minerai pour le traiter au Québec jusqu'au stade du produit semi-fini ou fini. Une saine fiscalité minière doit non seulement comporter des incitations à transformer le minerai actuellement exporté à l'état brut ou en concentré mais aussi des mesures destinées à favoriser la découverte et l'extraction de minerai pour alimenter les usines de transformation déjà en exploitation au Québec. Vu l'aspect hautement technique du régime d'imposition des compagnies minières, il convient de ne présenter ici que les principales caractéristiques des mesures les plus importantes. On trouvera d'ailleurs en annexe une description plus complète du nouveau régime. En matière de droits sur les mines, est-il nécessaire de rappeler que nous poursuivons un double objectif: premièrement, permettre à l'État, par conséquent à la population du Québec, de retirer une plus juste part des revenus provenant de l'exploitation de ses richesses naturelles, et deuxièmement, encourager une utilisation rationnelle et efficace de celles-ci. Dans la poursuite du premier objectif, des droits progressifs, fondés sur les bénéfices miniers, constituent encore la meilleure forme d'imposition dans ce domaine. C'est ainsi qu'une mine dont le minerai est de haute teneur et de grande valeur sera imposée proportionnellement plus fortement qu'une exploitation marginale. La structure actuelle de nos droits sur les mines est ainsi constituée et c'est sur cette base que mon collègue, le ministre des Richesses naturelles présentera un projet de loi comportant une nouvelle échelle dont les taux varieront de 15% à 30% des bénéfices miniers. Les tranches, M. le Président, pour les bénéfices miniers inférieurs, $150,000 et moins il n'y aura pas d'impôt minier. Entre $150,000 et $3,150,000, le taux sera de 15%. Entre $3,150,000 et $10,150,000 de profits miniers, les droits de base seront de $450,000 sur la limite inférieure, sur $3,150,000 et taxés à 20% dans les limites de la tranche. Pour les profits miniers variant entre $10,150,000 et $20,150,000, les droits sur les mines à la limite inférieure de la tranche seront de $1,850,000 et le taux d'imposition dans les limites de la tranche, de 25%. Et finalement les profits supérieurs à $20,150,000, les droits sur les mines à la limite inférieure de la tranche seront de $4,350,000 et le taux d'imposition dans les limites de la tranche seront de 30%. Une structure de taux progressive peut susciter des problèmes aux entreprises qui exploitent des substances dont les prix connaissent des variations prononcées. Les bénéfices d'une année peuvent être très importants et être frappés de droits élevés, alors que l'année suivante, ils peuvent être inexistants ou même se transformer en pertes. Il convient donc de prévoir la possibilité de l'étalement du revenu ainsi que le report des pertes sur trois ans. De cette façon, les droits seront moins influencés par, les mouvements à court terme, et le seront davantage par la richesse de la mine elle-même. La poursuite du deuxième objectif, soit une, meilleure utilisation de nos ressources, nécessite l'application de mesures incitatives destinées à encourager l'exploration minière au Québec et une transformation plus poussée de notre minerai. En premier lieu, les actifs miniers et les actifs~ servant au traitement du minerai, acquis après le 31, mars 1975, pourront être amortis, selon la méthode; de l'amortissement uniforme, au taux de 30% au lieu 1 de 15% comme précédemment. Les frais d'exploration et de mise en valeur continueront d'être radiés au taux de 100%. De plus, nous introduirons, pour certaines dépenses engagées après le 31 mars 1975, deux nouveaux types d'incitation: une allocation d'exploration et une allocation d'investissements. La première autorisera les compagnies à réclamer, dans le calcul de leur revenu minier, une déduction égale $1 pour chaque tranche de $3 de dépenses d'expia ration faites au Québec. La deuxième permettra aux compagnies de réclamer le même type d'allocation gagnée suivant le même mécanisme, sauf que les dépenses admissibles s'appliqueront aux nouveaux investissements dans la concentration, le smeltage et l'affinage, à l'inclusion des actifs servant au traitement forfaitaire. Cette dernière mesure pour également s'appliquer dans le cas d'investissements au palier de la fabrication, dans la mesure où le lieutenant-gouverneur en conseil en aura donné l'approbation. En d'autres termes, ces deux types d'allocations sont semblables à l'épuisement gagné dans calcul de l'impôt sur les bénéfices des industri4 extractives. Une entreprise minière devra avoir investi soit dans l'exploration, soit dans la concentration, dans le smeltage, l'affinage ou la fabrication pour tirer avantage de ces incitations nouvelles. Enfin, l'allocation de traitement demeurera; 8% du coût des actifs québécois servant à 1 concentration; elle sera portée à 15% de celui d’actifs servant au smeltage et à l'affinage. En outre, taux de 15% s'appliquera au coût des installations concentration lorsque ce minerai est traité au Québec à un stade ultérieur par l'entreprise. Comme par le passé, l'allocation de traitement conservera son minimum de 15% et son maximum de 65% du profit minier. J'aborderai maintenant la Loi sur les impôts des corporations. Les sociétés minières continueront d'être imposées au taux des compagnies ordinaires, soit 12%. Toutefois, les modifications suivantes prendront effet à compter du 1er avril 1975. En premier lieu, les droits miniers ne seront plus déductibles pour les fins du calcul de l'assiette de l'impôt. Deuxièmement, l'épuisement automatique de 331/3% sera aboli pour être remplacé par l'épuisement gagné. En d'autres termes, l'épuisement sera gagné à raison de $1 pour chaque tranche de $3 de dépenses admissibles. Les dépenses admissibles seront celles qui ont été engagées depuis le 7 novembre 1969 en exploration et en mise en valeur attribuables au Québec, en immobilisations destinées à une nouvelle mine ou à une expansion importante d'une mine existante, et à certaines installations de traitement du minerai. En outre, elles comprendront le coût de certains actifs communautaires. Cela semble être un moyen raisonnable de compenser les compagnies minières d'une partie des coûts qui, si ce n'était de l'éloignement, seraient normalement supportés par la collectivité. Nous permettrons également l'inclusion dans la banque d'allocation d'épuisement des frais d'exploration engagés sur le site d'une mine après son entrée en production commerciale raisonnable. Ce prolongement du concept de dépenses admissibles aura des effets favorables dans le cas des mines souterraines qui sont dans l'impossibilité physique de faire toutes leurs recherches d'exploration avant leur entrée en production. À titre de mesures complémentaires, nous avons décidé de maintenir le statut fiscal privilégié des prospecteurs et des commanditaires en prospection. En outre, la réduction de la taxe de vente en fonction des ventes faites en dehors du Québec sera retirée aux compagnies minières. Toutefois, l'exemption relative à la production manufacturière exportée demeurera inchangée. Les compagnies engagées au Québec dans le smeltage et l'affinage bénéficieront, selon les mêmes règles, de l'exemption accordée aux entreprises manufacturières. En conséquence, la réduction de la taxe de vente, en fonction des ventes faites en dehors du Québec, s'appliquera aux équipements et autres achats pour usage et consommation servant aux fins exclusives des opérations de smeltage et d'affinage. Il est bien difficile d'estimer précisément les recettes fiscales immédiates provenant de la nouvelle imposition des entreprises minières. Comment, en effet, prévoir à la fois le niveau des prix des matières premières et le comportement des entreprises à l'égard des nouveaux stimulants à l'exploration et à la transformation? Les études effectuées par les ministères des Richesses naturelles et des Finances permettent cependant de prévoir une augmentation des recettes fiscales provenant de l'industrie minière et d'affirmer que le rendement des investissements dans le secteur minier québécois sera tout aussi intéressant que celui des investissements chez nos concurrents ou encore dans d'autres secteurs industriels, compte tenu des risques inhérents au secteur minier. M. le Président, je voudrais maintenant toucher au chapitre de l'aide aux municipalités. L'aide aux municipalités figure cette année encore parmi les objectifs prioritaires du gouvernement. En effet, face à la cadence accélérée des coûts, les administrations municipales peuvent difficilement financer leurs budgets en ne comptant que sur les impôts locaux. Ceux-ci, en particulier l'impôt foncier, progressent difficilement au rythme de l'augmentation des coûts. La situation financière des municipalités nous a amenés à établir une politique d'aide qui s'articule autour des deux pôles suivants. D'une part, le montant global de nos transferts s'est accru à un rythme sans précédent, passant de $333 millions à $811 millions en trois ans. De fait, le gouvernement du Québec a financé plus de la moitié de la croissance des dépenses municipales. D'autre part, nous avons voulu éviter que ces transferts n'amènent les élus municipaux à abdiquer leurs responsabilités. Ces derniers doivent en effet continuer de répondre aux besoins tels qu'ils sont perçus localement. C'est pourquoi l'aide aux municipalités prend surtout la forme d'ouverture de champs fiscaux et de transferts inconditionnels. Ainsi, au cours des trois dernières années, ces formes d'aide se sont accrues de $361 millions, alors que les transferts conditionnels n'augmentaient que de $117 millions. Un des résultats de la conférence provinciale-municipale de 1971 a été l'annonce d'une libération de $0.15 par $100 d'évaluation du champ de l'impôt foncier scolaire au profit des municipalités ou des contribuables. Ce transfert devait s'effectuer sur une période de cinq ans; en fait, il l'a été sur trois ans, et le taux normalisé de l'impôt foncier scolaire a été réduit de $1.40 à $1.25 par $100 d'évaluation. Au cours de l'année, le gouvernement a engagé des entretiens avec les représentants de la Fédération des commissions scolaires, de l'Union des municipalités et de l'Union des conseils de comté. Ces deux derniers organismes nous ont fait valoir que la réduction du taux normalisé avait été neutralisée en partie par un accroissement des rôles d'évaluation pour fins scolaires et par les surtaxes levées pour financer les dépenses inadmissibles aux subventions d'équilibre budgétaire. Pour sa part, la Fédération des commissions scolaires a réitéré, par souci d'autonomie, son désir de conserver son droit à l'impôt foncier. Sans vouloir trancher ce débat de façon définitive, nous avons décidé de réduire le taux normalisé de l'impôt foncier scolaire de $0.20 par $100 d'évaluation en une seule étape pour le fixer à $1.05 dès le 1er juillet prochain. La même baisse de $0.20 s'appliquera aussi à l'impôt foncier scolaire plus élevé des compagnies situées à Montréal et à Québec. De plus, en 1975176- et je pense que c'est une mesure extrêmement importante et qui va modifier, en quelque sorte, l'évolution de ce dossier- J'utilisation des facteurs de correction par rapport à l'évaluation municipale doit être telle que le résultat n'amène pas une hausse de plus de 10% de l'évaluation d'un immeuble donné, comparativement à 1974/75. Des crédits ont déjà été consentis au ministère de l'Éducation pour lui permettre de combler ce manque à gagner des commissions scolaires. Ce transfert fiscal permettra aux municipalités exploiter plus à fond les possibilités de leur principale source de revenus sans accroître le fardeau fiscal des contribuables. Si les municipalités allègent qu'elles n'ont pas à utiliser ce nouveau champ d'impôt foncier, ce sera un gain net pour les propriétaires de maisons. Malgré ce changement, l'impôt foncier, il faut bien l'admettre, demeurera quand même une source importante de revenus pour les commissions scolaires. M. le Président, dans la mesure où l'impôt foncier constitue l'instrument privilégié de la fiscalité municipale, il est logique de chercher à améliorer et à moderniser la base sur laquelle il s'appuie. C'est pour cette raison que nous poursuivons le processus de réforme de l'évaluation foncière amorcé il y a quelques années. Dans cet ordre d'idées, nous remettrons aux municipalités la totalité de l'impôt spécial perçu en guise d'impôt foncier sur les compagnies distributrices de gaz ou exploitant un réseau de télécommunications. Le produit de cet impôt était autrefois partagé entre les municipalités et les commissions scolaires. Cette décision apportera des revenus additionnels de $7 millions aux municipalités. En outre, les terrains vagues acquis par le gouvernement en vue de la construction d'édifices et les terrains de camping appartenant à l'État feront désormais l'objet d'une évaluation et les municipalités où ils sont situés recevront une compensation en guise d'impôt foncier. Enfin, la compensation versée aux municipalités en guise d'impôt foncier pour les universités, les CEGEP, les hôpitaux et les centres d'accueil sera majorée. Pour les universités et les CEGEP, les taux passeront de $25 à $35 par élève, pour les centres d'accueil, de $20 à $25 par lit et pour les hôpitaux, de $35 à $45 par lit. Cette mesure augmentera les revenus des municipalités de près de $3 millions. Enfin, M. le Président, pour venir en aide aux municipalités les plus populeuses, le gouvernement utilise, depuis quelques années, un programme de subventions statutaires qui s'appliquent aux municipalités de 25,000 habitants et plus. Les taux varient suivant la population. Bien que le régime actuel se soit avéré très avantageux pour les municipalités, nous désirons y apporter trois améliorations majeures. En premier lieu, le programme sera étendu aux municipalités de 15,000 habitants et plus. Le nombre des municipalités qui recevaient déjà la subvention sera ainsi doublé, passant de 32 à 64. En second lieu, la subvention sera fondée sur la population annuelle établie par le Bureau de la statistique du Québec plutôt que sur les données quinquennales de Statistique Canada. Cette amélioration, rendue possible grâce à la mise au point de techniques démographiques plus perfectionnées, profitera spécialement aux villes en pleine expansion, qui devaient attendre cinq ans avant que le chiffre de leur population ne soit corrigé. Celui-ci sera dorénavant ajusté annuellement avec un décalage d'un an. Ainsi, ce sont les populations du 1er juillet 1974 qui serviront au calcul des subventions en 1975 en tenant compte, toutefois, des fusions et. De même, les subventions de 1976 seront mesure les populations de 1975 et ainsi de suite. Enfin, c'est le troisième changement, l'échelle de taux des subventions, en plus d'être majorée considérablement, deviendra une échelle de taux marginaux et non de taux absolus comme à l'heure actuelle. En d'autres termes, les nouveaux taux s'appliqueront à chaque tranche excédant certains paliers au lieu de s'appliquer, comme à l'heure actuelle, à la population totale en deçà de certaines limites. Par exemple, une municipalité de 200,000 habitants aurait reçu, en 1975, selon le régime actuel, $2 millions, soit $10 par habitant. Selon la nouvelle formule, elle recevra $3,305,000, soit $2,205,000 pour les 150,000 premiers habitants et $1,100,000 pour les 50,000 autres, c'est-à-dire $22 par tête sur l'excédent de 150,000. L'échelle marginale a l'avantage de mieux adapter les subventions à la nature croissante des besoins lorsque la taille d'une municipalité s'accroît. En outre, elle évite qu'une municipalité ne reçoive des dizaines ou des centaines de milliers de dollars de plus pour une croissance de quelques centaines de personnes lorsqu'elle passe d'une classe de taux à une autre. Par exemple, une municipalité dont la population est de 49,000 habitants aurait reçu, selon l'ancien régime, $296,000 ou $6 par tête pour 49,000 habitants tandis qu'une autre d'une population de 51,000 aurait bénéficié d'une subvention de $510,000 soit au-delà de $200,000 additionnels pour 2,000 âmes de plus. Avec la nouvelle échelle marginale, de telles discontinuités ne se reproduiront plus. Ainsi, la municipalité de 49,000 habitants recevra $442,000 et celle de 51,000 recevra $471,000. Le nouveau régime de subventions per capita procurera aux grandes et moyennes municipalités $51.5 millions en 1975;76 comparativement à $27 millions qu'aurait donnés le régime actuel. Il est vrai que les grandes municipalités toucheront proportionnellement plus que les autres mais leurs besoins financiers sont plus grands. Au demeurant, les modifications de taux et les estimations annuelles de population font en sorte que toutes les municipalités recevront davantage que sous l'ancien régime. Jointes à la redistribution de la taxe de vente et de la taxe sur les repas et l'hôtellerie, ces subventions statutaires constituent la base de l'aide inconditionnelle du gouvernement aux municipalités. Il est bien évident qu'on ne peut exclure la possibilité de besoins supplémentaires pour certaines d'entre elles, plus particulièrement pour celles qui ne sont pas admissibles à ce régime. Dans les crédits déposés le 25 mars, nous avons inclus un fonds de $33 millions en subventions spéciales ou d'équilibre budgétaire à ces municipalités. Depuis leur création, les communautés urbaines de Montréal, de Québec et de l'Outaouais voient leur budget croître à des rythmes élevés. Leur financement fait porter aux municipalités constituantes un fardeau de plus en plus lourd. Pour venir en aide à ces collectivités, les crédits déposés le 25 mars augmentaient à $50 millions notre programme d'aide aux communautés urbaines. Cela correspond à une croissance de plus de 40% sur l'an passé. Dans certains cas, la fusion de municipalités peut donner lieu à une taxe "ex-ville" qui a pour but de financer le service de la dette pour des emprunts contractés avant la fusion. Je sais qu'il s'agit là d'une question qui vous intéresse particulièrement. M. le Président, de même que vos collègues des Mille-Îles et de Fabre. Dans le cas particulier de ville Laval, certains contribuables locaux ont supporté le fardeau de cette taxe pendant dix ans. L'an dernier, nous avons versé une subvention de $4.5 millions pour libérer ces contribuables de cette taxe particulière. Le gouvernement a décidé d'accorder une subvention qui sera versée annuellement jusqu'à la disparition complète de la dette dont la taxe "ex-ville" finançait le service. Les crédits budgétaires déposés le 25 mars s'élevaient à $8,195 millions. Ainsi qu'il a été expliqué à ce moment, le niveau des revenus et des dépenses est maintenant présenté selon le concept du budget brut. En effet, certaines recettes n'apparaissent plus en soustraction des dépenses, mais sont comptabilisées dans l'état des revenus. Cette nouvelle présentation permet de mieux traduire le niveau réel de l'activité gouvernementale. Pour fins de comparaisons, on trouvera en annexe les résultats financiers des trois dernières années et les prévisions 1975/76, comptabilisés sur cette base. À l'examen de ces tableaux, on remarquera que les revenus et les dépenses ont augmenté plus rapidement que prévu en 1974/75. Du côté des revenus, le dépassement est imputable principalement à l'impôt sur le revenu des particuliers, à la suite de la hausse exceptionnelle de 18.1% du revenu personnel en 1974, ce qui est supérieur à la moyenne canadienne et à la péréquation. Quant aux dépenses, les dépassements les plus importants sont reliés à l'inflation. Ainsi, une somme de $370 millions a été versée aux employés des secteurs public et parapublic comme rajustement à l'augmentation du coût de la vie. Au total, les revenus bruts pour 1974/75, soit l'exercice qui s'est terminé le 31 mars, se sont élevés à $6,900 millions, alors que les dépenses brutes ont atteint $7,125 millions, laissant un déficit de $225 millions, soit $50 millions de moins que prévu l'an dernier lors du discours sur le budget. Pour 1975/76, je prévois des revenus bruts de $7,925 millions, compte tenu des modifications fiscales annoncées ce soir. Par ailleurs, en ajoutant aux crédits initiaux de $8,195 millions des crédits additionnels de $30 millions pour les municipalités. Le total des crédits budgétaires s'élèvera à $8,225 millions, c'est-à-dire que le déficit budgétaire sera de l'ordre de $300 millions. Les déboursés non budgétaires seront de $200 millions. Par ailleurs, nous rembourserons $189 millions d'obligations qui viendront à échéance en 1975/76. Le total de nos emprunts sera donc de $689 millions, comparativement à $593 millions en 1974/75. Le recours aux marchés financiers, à l'inclusion de la participation de la Caisse de dépôt et de placement, ne sera cependant que de l’ordre de $550 millions, compte tenu des prêts provenant du gouvernement fédéral et du produit de la prochaine campagne d'obligations d'épargne. En fait, ces obligations d'épargne seront mises en vente à compter du 19 mai et porteront une échéance de cinq ans et un taux d'intérêt de 8 1/2% l'an. L'Hydro-Québec, pour ses propres besoins et ceux de la Société d’énergie de la baie James, prévoit emprunter environ $800 millions durant son exercice 1975, comparativement à $703 millions en 1974. Je voudrais maintenant traiter très brièvement des relations fédérales-provinciales, en particulier des implications de la politique énergétique canadienne. À la suite de l'accord intervenu à la conférence des premiers ministres de mars 1974, le Canada a adopté des mécanismes qui ont permis de protéger, dans une certaine mesure, l'économie canadienne des bouleversements que connaissait le marché mondial. Par ces mécanismes, le gouvernement fédéral subventionne le prix du pétrole importé par les provinces de l'Atlantique et le Québec à même les revenus de la taxe à l'exportation sur le pétrole vendu aux États-Unis. Grâce à cette politique, les consommateurs québécois ont pu bénéficier depuis lors d'un prix égal à 60% seulement du prix mondial. En termes monétaires, cette subvention équivaut à environ $2 millions par jour, soit plus de $700 millions sur une base annuelle, subvention dont ont profité directement les consommateurs québécois de pétrole. Comme on le sait, cet accord prévoyait égaiement que les provinces productrices pourraient augmenter leurs redevances pétrolières. Même si une modification a été apportée à la formule de péréquation pour n'y inclure que le tiers des revenus additionnels découlant de cette hausse des redevances, le Québec a bénéficié, de la part du gouvernement fédéral, d'une augmentation de $120 millions au titre de la péréquation des redevances provenant du gaz et du pétrole. Dans l'ensemble, la péréquation a procuré au Québec des revenus de $903 millions en 1974/75 comparativement à $664 millions en 1973/74, soit une augmentation de 36%, ce qui faisait dire à certains journalistes, cet après-midi, que c'est véritablement là un fédéralisme rentable. La fixation du prix du pétrole et du gaz était à l'ordre du jour de la conférence des premiers ministres, qui s'est tenue la semaine dernière. Le premier ministre du Québec a alors défendu le droit légitime des provinces productrices de hausser le prix de leurs ressources non renouvelables. Étant donné la situation économique actuelle, il a toutefois fortement souhaité qu'on limite le plus possible, pour l'instant, la hausse du prix du pétrole et du gaz au Canada et qu'on attende, pour combler l'écart avec nos concurrents, le moment où l'économie canadienne donnera des signes évidents de reprise. Bien qu'un consensus n'ait pu être atteint pour le moment, il semble bien que l'on s'orientera vers ce genre de compromis au cours des prochains mois. Quoi qu'il en soit, M. le Président, le Québec a toutes les raisons de se montrer heureux de l'évolution de ce dossier qui a permis à la fois d'obtenir des prix plus avantageux pour les consommateurs, des revenus accrus pour les trésors publics provinciaux et une meilleure garantie des approvisionnements pour l'avenir. En conclusion, M. le Président, je dirai que ferait preuve de bien peu de réalisme celui qui refuserait d'admettre l'existence de certains problèmes économiques au Canada. En effet, notre économie est aux prises avec ce phénomène mondial que l'on a appelé la "stagflation", c'est-à-dire ce mélange de stagnation et d'inflation. D'un côté, la baisse de l'emploi et, de l'autre, la poussée inquiétante des prix. Il n'est pas facile de choisir la bonne orientation face à un tel paradoxe. Un gouvernement veut-il stimuler l'économie qu'il risque d'ajouter aux pressions inflationnistes. Du moins, ses adversaires proclameront-ils à grands cris qu'il attise délibérément le feu de l'inflation. Veut-il atténuer les pressions inflationnistes qu'il risque de compromettre la croissance. De toute façon, ses adversaires l'accuseront de créer délibérément du chômage. Nous nous sommes efforcés d'éviter ces deux écueils en proposant des allégements fiscaux de plus d'un demi-milliard de dollars destinés à la fois à stimuler l'économie et à atténuer les pressions inflationnistes: $420 millions de baisse de l'impôt sur le revenu des particuliers; $20 millions de baisse à l'impôt sur les profits des sociétés; $20 millions de baisse aux taxes à la consommation et $80 millions à l'impôt foncier scolaire. Soit dit en passant, en soulignant le coût de la baisse de l'impôt foncier scolaire qui représente $80 millions, M. le Président, hier, le chef de l'Opposition s'est pourfendu d'une deuxième prose fiscale. Le chef de l'Opposition, le nouveau chancelier de l'Échiquier du Parti québécois Sir Jacques-Yvan Morin, a publié un deuxième budget. J'étais à regarder les statistiques et les annexes économiques de mon document lorsqu'on m'a apporté le document qui venait d'être rendu public et je me suis dit: Un deuxième budget du Parti québécois. Je pensais qu'il était dompté, mais il n'a pas l'air d'être dompté. En lisant le document. M. le Président, il faut quand même être un peu sérieux dans l'analyse de tels essais budgétaires. Je cite la première recommandation du Parti québécois où on propose l'indexation de l'impôt sur le revenu suivant la formule adoptée par le gouvernement fédéral et toutes les autres provinces. Ainsi, les exemptions personnelles pour célibataires devraient être portées à$1760 et celles pour les personnes mariées à $3,345. Or, si nous devions indexer l'impôt sur le revenu des particuliers en augmentant les exemptions de base au niveau de celles du fédéral et des autres provinces, ce n'est pas à $1 ,760 et à $3,345 qu'il faudrait les' chiffrer, mais bien à $1 ,878 et à $3,522, comme c'est le cas présentement. Deuxièmement, le chef de l'Opposition, le nouveau Chancelier de l'Échiquier du Parti québécois, indique ou suggère une baisse de l'impôt foncier scolaire de $0.25 les $100 d'évaluation et donne comme coût $50 millions. Actuellement, l'impôt foncier scolaire rapporte environ $500 millions et le taux normalisé est de $1.25, ce qui veut dire environ $2millions par $0.05 par cent dollars d'évaluation. Cinq fois $20 millions, cela fait $100 millions. Le Parti québécois a indiqué $50 millions. M. le Président, comme me répète souvent un de mes conseillers : "mais ce n'est pas tout". Le Parti québécois a donné, en annexe, des comparaisons fiscales entre les provinces. Je n'ai pas eu le temps de vérifier si les chiffres qu'il a donnés sont exacts. Mais si on tenait pour acquis, à un moment donné, juste pour les fins de la discussion, que les chiffres sont bons, voici ce que donnent les propositions du Parti québécois. Pour un contribuable marié, sans enfant, gagnant $6,000, il propose des baisses d'impôt de $113 alors que celles que nous suggérons sont de $229. Je pourrais donner toute une série, d'exemples, à même les chiffres que nous a fournis: le chef de l'Opposition qui démontreraient que la proposition du Parti québécois, comparée à la nôtre favorise les gros contribuables alors que celle de Parti libéral favorise les contribuables à revenu modeste. M. le Président, cela ne me surprend pas du tout. C'est un parti bourgeois et les propositions qu'il nous fait sont des propositions pour les bourgeois. Cela vaut à peine le papier sur lequel c'est écrit. M. le Président, $420 millions de baisse d'impôt1 à l'impôt sur le revenu des particuliers, $20 millions aux sociétés, $20 millions à la taxe sur la consommation et $80 millions à l'impôt foncier scolaire, soit des baisses d’impôt de plus de un demi-milliard de dollars. C'est ainsi que toutes ces réductions contribueront, d’une part, à stimuler la demande pour les biens de consommation; à promouvoir, par conséquent, la croissance de l'économie et, d'autre part, à atténuer les pressions sur les coûts de production en augmentant le salaire réel des travailleurs. De même, les stimulants aux investissements privés, ajoutés à l'accroissement substantiel des investissements publics, en plus de favoriser l'activité économique, contribueront à accroître notre capacité de production. Enfin, l'aide aux municipalités, tout en permettant de maintenir les emplois que celles-ci procurent, empêchera les impôts municipaux d'augmenter de façon indue et d'ajouter ainsi aux pressions inflationnistes. Le budget de ce soir, nous en sommes convaincus, aidera l'économie québécoise à reprendre son élan. Il serait toutefois illusoire de croire et surtout malhonnête de tenter de faire croire à la population qu'un État, quelque puissant ou indépendant qu'il puisse être, peut résoudre tous les problèmes. Aucun État ne peut s'isoler du reste du monde. En raison de ses échanges commerciaux, il subit forcément les contrecoups de ce qui se passe à l'extérieur. Si ses principaux partenaires commerciaux sont aux prises soit avec un ralentissement économique, soit avec l'inflation, soit avec les deux à la fois comme ce fut le cas en 1974, il sera lui aussi aux prises avec les mêmes problèmes. Les initiatives les plus hardies et les politiques les mieux éclairées ne pourront jamais les éliminer complètement. Elles peuvent certes les atténuer, et c'est l'objectif que vise le budget de ce soir. Même si un pays ou une province parvenait à s'isoler complètement du monde extérieur, son gouvernement ne pourrait davantage éliminer toutes les difficultés économiques. Bien que de nos jours l'État ait une influence de plus en plus marquée sur l'économie, il n'en reste pas moins que ce sont les citoyens eux-mêmes, individuellement ou collectivement, qui prennent les millions de décisions économiques d'accroître ou de retarder certaines dépenses de consommation ou certains investissements, d'exiger tel ou tel niveau de salaires ou de bénéfices, de travailler ou de s'en abstenir. J'ai confiance, M. le Président, que les Québécois associeront leurs efforts à ceux du gouvernement et que, dans un esprit de réalisme, nous travaillerons ensemble à édifier un Québec fort, dynamique et prospère. M. le Président, avant de reprendre mon siège, conformément à l'article 127, paragraphe 1, de notre règlement, je propose que l'Assemblée nationale approuve la politique budgétaire du gouvernement.